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L’ordonnance n° 2014-863 du 31 juillet 2014 relative au droit des sociétés (premières mesures)

L’ordonnance réformant le droit des sociétés est parue au JO de samedi dernier. Les thèmes qui sont abordés ne sont pas une surprise, dès lors que la loi d’habilitation du 2 janvier dernier (loi n° 2014-1) détaillait ce que seraient ces thèmes. Cependant, la manière dont les réformes ont été opérées appelle quelques commentaires, d’autant que l’ordonnance va parfois un peu plus loin que la loi d’habilitation ne le permettait.

Voyons dans ce post les premières mesures de l’ordonnance.

1) Simplification des formalités relatives à la cession de parts de SNC et de SARL.

 L’article 2 de l’ordonnance substitue à la publicité de la cession au registre du commerce et des sociétés (RCS) une publication des statuts audit registre, en précisant que le dépôt peut être effectué par voie électronique.

Ce faisant, les rédacteurs de l’ordonnance ont pris en compte le fait qu’en pratique, et même si les textes n’évoquaient pas la modification des statuts, on procédait généralement à une telle modification. Si on ne le faisait pas, il y avait un décalage entre les associés de la SNC ou de la SARL tels qu’ils apparaissaient aux tiers à la consultation du RCS et à la lecture des statuts. La jurisprudence avait en outre estimé que le dépôt des statuts modifiés rendait la cession opposable aux tiers (Cass. com., 18 déc. 2007 – solution rendue dans une affaire relative à une société civile, mais transposable aux autres sociétés).

 

2) Admission des cascades d’EURL.

 L’article 3, I de l’ordonnance supprime purement et simplement l’article L. 223-5 du Code de commerce, qui interdisait qu’une SARL ait pour associé unique une autre SARL « composée d’une seule personne », et prévoyait la possibilité d’une dissolution judiciaire des sociétés violant cette interdiction. L’article 3, II supprime une référence à cette disposition qui était présente dans un texte relatif à la société européenne, l’article L. 229-6 du Code de commerce.

 L’admission des cascades d’EURL avait été demandée par la pratique. Dans l’attente de cette admission, ceux qui voulaient mettre en place une telle structure devaient recourir à la SAS unipersonnelle, mais cela leur imposait de soumettre cette société au contrôle de commissaires aux comptes, dès lors que ce contrôle est obligatoire pour les SAS qui contrôlent une ou plusieurs sociétés ou sont contrôlées par une ou plusieurs sociétés (art. L. 227-9-1 C. com.).

  

3) Prorogation judiciaire du délai de tenue de l’assemblée générale annuelle d’unee SARL.

 Le gérant de SARL doit faire tenir au moins une assemblée par an, pour soumettre aux associés « le rapport de gestion, l’inventaire et les comptes annuels », et ce « dans le délai de six mois à compter de la clôture de l’exercice ». Il appartient donc au gérant de procéder à la convocation à temps pour respecter ce délai, faute de quoi il encourt des sanctions pénales, sauf à obtenir une prorogation judiciaire du délai.

 C’était du moins là la situation avant que la loi Warsmann II du 22 mars 2012 ne modifie la rédaction de l’article L. 241-5 du Code de commerce. Cette loi a supprimé la peine de six mois d’emprisonnement prévue par l’article L. 241-5 pour ne laisser subsister que l’amende de 9.000 euros, ce qui était raisonnable, dès lors que la peine d’emprisonnement n’était sans doute que très rarement prononcée, sinon jamais (en tous les cas, pas uniquement pour cela). Mais dans le même temps, un double doute était introduit.

Tout d’abord, là où le texte prévoyait antérieurement une sanction pénale en cas de consultation des associés faite sans respecter le délai de six mois précité, sauf prorogation, la rédaction nouvelle sanctionne le fait de « ne pas soumettre à l’approbation de l’assemblée des associés ou de l’associé unique l’inventaire, les comptes annuels et le rapport de gestion établis pour chaque exercice », ce qui laisserait entendre que ne pourrait plus être sanctionnée la consultation tardive des associés, mais seulement l’absence totale de consultation au jour où le juge statue, en vertu du principe d’interprétation stricte de la loi pénale.

Le second élément de doute introduit en 2012 concerne la possibilité d’une prorogation judiciaire, qui était possible dans l’ancienne rédaction de l’article L. 241-5 du Code de commerce mais n’est plus prévue dans la rédaction adoptée en 2012. Une cour d’appel a jugé que la prorogation était possible, mais sans que l’article L. 241-5 puisse constituer le fondement de la demande (CA Nîmes, 24 avril 2014, Dr. Sociétés 2014, comm. n° 129, obs. D. Gallois-Cochet). C’est pour clarifier la situation que l’article 4 de l’ordonnance permet expressément la prorogation judiciaire du délai de convocation.

 Ce n’est pas l’article L. 241-5 qui est à nouveau modifié, les rédacteurs de l’ordonnance ayant sans doute jugé qu’il était temps de trouver un nouveau souffre-douleur. Au-delà de la plaisanterie, il apparaît plus logique de modifier, comme l’ont fait les rédacteurs de l’ordonnance, l’article L. 223-26 du Code de commerce, puisque c’est ce texte qui édicte le délai de six mois (l’article L. 241-5 n’en parle plus, ainsi qu’on l’a dit). Il est donc rappelé qu’il est possible que le délai de six mois fasse l’objet d’une « prolongation » par décision de justice.

(à suivre: la réforme des conventions réglementées)

Bruno DONDERO

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L’ordonnance réformant le droit des sociétés au Conseil des ministres.

L’ordre du jour du Conseil des ministres du 30 juillet 2014 http://www.elysee.fr/conseils-des-ministres/article/ordre-du-jour-du-conseil-des-ministres-du-mercredi-30-juillet-201/ vise l’ordonnance relative au droit des sociétés, prise en application de l’article 3 de la loi n° 2014-1 du 2 janvier 2014 habilitant le Gouvernement à simplifier et sécuriser la vie des entreprises.

Pour rappel, le gouvernement a été habilité par la loi du 2 janvier 2014 à intervenir sur les points suivants:

1° Simplifier et sécuriser le régime des conventions réglementées dans les SA;
2° Sécuriser le régime du rachat des actions de préférence, s’agissant des conditions de ce rachat et du sort des actions rachetées ;
3° Simplifier et clarifier la législation applicable aux valeurs mobilières donnant accès au capital ou donnant droit à l’attribution de titres de créance ainsi qu’à certains titres de créance, s’agissant de leur émission et de la protection de leurs porteurs, faciliter l’identification des détenteurs de titres au porteur et adapter le régime des opérations sur titres et des droits de souscription ;
4° Permettre la prolongation du délai de tenue de l’assemblée des associés appelée à statuer sur les comptes annuels dans les SARL ;
5° Permettre à une EURL d’être associée d’une autre EURL ;
6° Simplifier les formalités relatives à la cession des parts sociales de SNC et de SARL tout en maintenant sa publicité ;
7° Renforcer la base juridique permettant au Haut Conseil du commissariat aux comptes de conclure des accords de coopération avec ses homologues étrangers en prévoyant l’organisation de contrôles conjoints auxquels participent des agents de ces derniers ;
8° Modifier l’art. 1843-4 C. civ. pour assurer le respect par l’expert des règles de valorisation des droits sociaux prévues par les parties ;
9° Modifier les dispositions du Code de commerce applicables, y compris outre-mer, aux ventes en liquidation et déterminant l’autorité administrative auprès de laquelle doit être effectuée la déclaration préalable.

Bruno DONDERO

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