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Cours de droit des sociétés: clause n° 8 (Michelin)

Chers étudiants, chers participants au cours de droit des sociétés, nous nous retrouvons demain pour la suite du chapitre sur les associés. Nous finirons de voir la situation des droits sociaux indivis et ensuite nous étudierons le démembrement de parts sociales ou d’actions.

Pour comprendre ces questions d’un point de vue pratique, nous partirons d’un article des statuts de la société Michelin, que je reproduis ci-dessous:

Art. 8 statuts Michelin actions.PNG Nous relèverons ensemble les restrictions particulières apportées à la représentation des indivisaires par cette stipulation statutaire.

Nous étudierons aussi le partage des droits opéré entre l’usufruitier et le nu-propriétaire d’actions.

Je vous retrouve demain en amphithéâtre ou sur Facebook en direct!

Bruno DONDERO

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Quatre arrêts importants des six derniers mois en droit général des sociétés.

Entre novembre 2013 et mars 2014, la Cour de cassation a rendu quatre décisions importantes intéressant le droit des sociétés, et plus précisément le droit général des sociétés, puisque les solutions formulées par chacun des quatre arrêts présentés ci-dessous ne trouvent pas leur fondement dans un régime spécifique (SARL, SAS, etc.), même si c’est toujours une société d’un type déterminé qui était en cause, bien entendu.

J’ai renvoyé au commentaire que j’avais fait sur chacune de ces décisions sur ce blog. Elles ont bien entendu été commentées aussi dans les revues juridiques.

De l’arrêt le plus récent au plus ancien :

 

1. Cass. com., 11 mars 2014 : évolution sur l’article 1843-4 du Code civil.

 La Cour de cassation fait un revirement selon les uns (je le pense), ou confirme sa pensée, selon d’autres commentateurs. Elle soustrait à l’article 1843-4 du Code civil, qui permet de demander au juge de nommer un expert pour déterminer la valeur des parts ou des actions dont la cession est prévue, la promesse unilatérale de vente librement consentie.

C’est un arrêt à diffusion maximale : publication aux deux Bulletins, mention au Rapport annuel et diffusion sur le site internet de la Cour de cassation (P+B+R+I). Il a sa page Facebook personnelle (je plaisante… mais tout peut arriver).

 Commentaire plus approfondi ici : https://brunodondero.wordpress.com/2014/03/18/article-1843-4-quapporte-larret-du-11-mars-2014/

 

 2. Cass. com., 18 février 2014 : la faute séparable des prérogatives de l’associé.

 Des arrêts le laissaient entendre, cette décision le dit clairement. Ce n’est que s’il commet une faute intentionnelle, d’une particulière gravité, incompatible avec l’exercice normal de ses prérogatives, que l’associé engage sa responsabilité personnelle à l’égard des tiers. Est ainsi transposée à l’associé la faute séparable des fonctions du dirigeant. L’arrêt est publié au Bulletin.

Commentaire plus approfondi ici : https://brunodondero.wordpress.com/2014/03/11/la-faute-separable-des-prerogatives-de-lassocie-cass-com-18-fevr-2014/

Synthèse sur la faute séparable des fonctions du dirigeant là : https://brunodondero.wordpress.com/2014/02/16/principe-dirresponsabilite-civile-du-dirigeant-de-societe-a-legard-des-tiers-la-regle-et-ses-limites/

  

3. Cass. com., 21 janvier 2014 : l’associé indivisaire peut participer aux décisions collectives, alors même que les indivisaires ont un représentant unique à l’assemblée.

Outre que la qualité d’associé de l’indivisaire est affirmé clairement par cet arrêt (mais ce n’est pas une nouveauté), il juge que les indivisaires peuvent se rendre à l’assemblée (y compris par le biais d’un mandataire) alors même qu’ils sont tous représentés à cette assemblée par un mandataire unique. L’arrêt est publié au Bulletin.

 

Commentaire plus approfondi ici : https://brunodondero.wordpress.com/2014/02/07/lassocie-indivisaire-represente-deux-fois-a-lassemblee-cass-com-21-janvier-2014/

 

4. Cass. com., 13 novembre 2013 : une société peut rendre ses statuts « non invocables » par les tiers.

 Une clause des statuts peut interdire aux tiers de s’en prévaloir. La loi dit pour les différents types de société que les limitations statutaires aux pouvoirs des dirigeants sont inopposables aux tiers, et la jurisprudence en tirait argument pour dire qu’a contrario, les tiers peuvent se prévaloir des limitations statutaires. Pas si les statuts le leur interdisent, dit cet arrêt, non publié au Bulletin il est vrai.

 

Commentaire plus approfondi ici : https://brunodondero.wordpress.com/2014/02/23/une-societe-peut-empecher-les-tiers-dinvoquer-ses-propres-statuts-contre-elle/

 

 

Bon travail à mes étudiants qui révisent… et aux autres !

 

Bruno DONDERO

 

 

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L’associé (indivisaire) représenté deux fois à l’assemblée ! Cass. com., 21 janvier 2014

La Cour de cassation a rendu le 21 janvier 2014 un arrêt destiné à être publié au Bulletin et relatif au droit de l’indivisaire de droits sociaux à participer à l’assemblée générale de la société, alors que le représentant de l’indivision est également présent. L’arrêt (http://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriJudi.do?oldAction=rechJuriJudi&idTexte=JURITEXT000028515006&fastReqId=591832934&fastPos=3) est assez intéressant en ce qu’il touche à des questions fondamentales du droit des sociétés (sans opérer de révolution).

Pour mieux le comprendre, on rappellera le texte de l’article 1844 du Code civil, qui permet de comprendre l’arrêt :

« Tout associé a le droit de participer aux décisions collectives.

Les copropriétaires d’une part sociale indivise sont représentés par un mandataire unique, choisi parmi les indivisaires ou en dehors d’eux. En cas de désaccord, le mandataire sera désigné en justice à la demande du plus diligent.

Si une part est grevée d’un usufruit, le droit de vote appartient au nu-propriétaire, sauf pour les décisions concernant l’affectation des bénéfices, où il est réservé à l’usufruitier.

Les statuts peuvent déroger aux dispositions des deux alinéas qui précèdent. »

 

Des parts d’une EARL (exploitation agricole à responsabilité limitée – une forme de société civile à objet agricole) étaient démembrées, et la nue-propriété était en indivision entre trois personnes. La société faisait assigner une indivisaire et son conjoint (le couple Y). Alors que la première avait donné mandat au second de la représenter lors des assemblées d’associés, la société prétendait qu’il soit dit que l’épouse n’avait aucune qualité pour assister à ces assemblées, qu’il lui soit fait défense de s’y faire assister ou représenter par son conjoint et enfin qu’il soit fait défense audit conjoint de pénétrer au siège social. La cour d’appel saisie du litige donnait raison à la société et jugeait qu’un mandataire commun des indivisaires ayant été désigné, il n’y avait pas lieu de « dissocier artificiellement la discussion préalable des points soumis au vote et le vote lui-même, qui participent d’une seule démarche intellectuelle, en sorte que la présence des indivisaires eux-mêmes aux assemblées générales [était] nécessairement exclue par la désignation d’un mandataire commun pour représenter l’indivision ».

 

Etait donc posée la question de savoir si, alors que l’indivision avait déjà un représentant commun à l’assemblée, un indivisaire pouvait encore être présent lors de celle-ci, et au besoin se faire représenter (Mme Y prétendait être représentée par son conjoint). En somme, pouvait-on cumuler la représentation collective des indivisaires prévue par l’article 1844 et la représentation individuelle des associés ?

 

La Cour de cassation répond de manière affirmative, au motif que « les copropriétaires indivis de droits sociaux ont la qualité d’associé » et que tout associé a le droit de participer aux décisions collectives (y compris en se faisant représenter). La cour d’appel avait donc violé l’article 1844 du Code civil en privant l’associée qu’était Mme Y, titulaire de la nue-propriété de droits sociaux en indivision, du droit de se faire représenter par son conjoint aux assemblées générales… ce qui revient à reconnaître le droit d’un associé à bénéficier simultanément de deux représentants !

 

Il faut rappeler ici plusieurs choses, qui permettent de comprendre la décision.

 

L’arrêt porte sur les droits de l’associé.

 La qualité d’associé du titulaire de la nue-propriété de droits sociaux est affirmée depuis longtemps par la Cour de cassation (Cass. com., 4 janv. 1994, n° 91-20256, Bull. IV, n° 10, http://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriJudi.do?oldAction=rechJuriJudi&idTexte=JURITEXT000007032261&fastReqId=1878753352&fastPos=1). Il en est de même pour l’indivisaire de droits sociaux (Cass. civ. 1ère, 6 févr. 1980, n° 78-12513, Bull. I, n° 49, http://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriJudi.do?oldAction=rechJuriJudi&idTexte=JURITEXT000007005038&fastReqId=1916137025&fastPos=1).

 Le nu-propriétaire indivis a donc incontestablement la qualité d’associé, dès lors qu’il détient en indivision des droits conférant la qualité d’associé. Ce point étant réglé, on pouvait tout de même s’interroger sur la possibilité que le nu-propriétaire indivis soit représenté deux fois à l’assemblée.

 L’arrêt rappelle l’importance du droit de l’associé à participer aux décisions collectives.

 Le pourvoi en cassation formé par les conjoints qui avaient été bannis des assemblées est accueilli par la Chambre commerciale pour violation de l’article 1844, al. 1er du Code civil, dont l’énoncé constitue le chapeau de l’arrêt : « Attendu que tout associé a le droit de participer aux décisions collectives ».

 Il n’est bien entendu pas question que le même droit de vote soit utilisé deux fois pour voter sur la même décision, une fois par le mandataire commun des indivisaires et une fois par le représentant individuel de l’indivisaire pris individuellement. La Cour de cassation reprend en réalité la distinction du droit de vote et du droit de participer aux décisions collectives, déjà retenue par d’autres arrêts (Cass. com., 2 déc. 2008, n° 08-13185, http://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriJudi.do?oldAction=rechJuriJudi&idTexte=JURITEXT000019882804&fastReqId=1202648634&fastPos=1).

 En somme, si le droit de vote des indivisaires est exercé par un mandataire, cela ne saurait priver l’associé qu’est par ailleurs l’indivisaire de son droit de participer aux décisions collectives, que ce soit personnellement ou par le biais d’un représentant.

 En matière de société anonyme, la Cour de cassation autorise un actionnaire à confier simultanément à plusieurs mandataires la mission de le représenter (Cass. com., 19 sept. 2006, n° 05-13264, http://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriJudi.do?oldAction=rechJuriJudi&idTexte=JURITEXT000007511024&fastReqId=1276720158&fastPos=1), tandis qu’en matière de SARL, l’article L. 223-28 du Code de commerce interdit expressément à un associé de « constituer un mandataire pour voter du chef d’une partie de ses parts et voter en personne du chef de l’autre partie »…

 Mais ne pourrait-on admettre qu’un associé nomme un mandataire pour le représenter dans l’exercice de son droit de vote et se rende tout de même à l’assemblée pour exercer son droit de participer aux décisions collectives ? Si un indivisaire peut le faire, un « plein associé » ne pourrait-il a fortiori scinder son droit de vote et de participer aux décisions collectives ? La réponse nous semble cependant négative en principe, et ce pour deux raisons au moins. D’une part, les droits sociaux sont indivisibles à l’égard de la société, ce qui doit interdire de les écarteler ainsi. D’autre part, si l’indivisaire se trouve autorisé à voter par mandataire tout en participant directement par ailleurs (éventuellement par un autre mandataire), il faut se souvenir que la loi lui impose de passer par le mandataire commun de l’article 1844 du Code civil ou de l’article L. 225-110 pour exercer son droit de vote, sans qu’il puisse donc le mettre en œuvre personnellement. En revanche, il doit être possible à un associé, lorsque la loi ne l’interdit pas comme elle le fait pour la SARL, d’être présent pour une partie de ses parts ou actions et d’être représenté pour le reste.

 Bruno DONDERO

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