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Cours de droit des sociétés 2: conventions réglementées et garanties consenties par la SA

Nous nous retrouvons ce lundi pour nos 3 heures de cours de droit des sociétés 2. Nous continuerons l’étude de la société anonyme (SA), en abordant la composition et le fonctionnement du conseil d’administration, du directoire et du conseil de surveillance. Nous verrons notamment les questions « classiques » que sont le régime des conventions réglementées et celui de l’autorisation des cautions, avals et garanties.

Pour ceux qui ont la matière en TD, j’ai mis en ligne sur l’EPI et remets ici en ligne le fascicule de la séance n° 2.

Je mets aussi en ligne un document que nous utiliserons comme illustration et qui est le rapport spécial des commissaires aux comptes sur les conventions réglementées de la société PSA pour l’exercice 2019.

Vous avez peut-être été voir la vidéo que j’ai faite pour synthétiser le régime des apports dans la SA. Précisément, j’ai un peu trafiqué les sous-titres pour que les cow-boys du film « Les 7 mercenaires » (un classique) vous parlent de votre cours. Vos retours sur cette « aide pédagogique » sont les bienvenus!

« Allez me chercher le commissaire aux apports! »

A lundi! – exceptionnellement, notre cours aura lieu de 15 à 18h.

Bruno Dondero

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Apprendre le droit avec « Potiche »: les conseils d’administration

Trop peu de films et de séries nous ouvrent les portes des conseils d’administration. Merci à François Ozon de l’avoir fait avec le film Potiche. Catherine Deneuve, P-DG, s’oppose à son mari, joué par Fabrice Luchini.

Le petit extrait qui est présent dans la vidéo mise en ligne sur notre chaîne YouTube nous permet de repérer un petit « faux-raccord » juridique, qui ne gâchera absolument pas le plaisir de voir ou revoir Potiche!

En effet, alors que les conseils d’administration des sociétés anonymes statuent selon l’article L. 225-37 à la majorité « par tête » des administrateurs, celui que nous voyons délibérer dans l’extrait du film prend en compte le pourcentage du capital social détenu. Précisons que cela serait possible aujourd’hui dans une SAS dont les statuts le prévoiraient… mais cette forme de société n’existait pas en 1977, année où se déroule le film!

Article L. 225-37 du Code de commerce (extraits):

A moins que les statuts ne prévoient une majorité plus forte, les décisions sont prises à la majorité des membres présents ou représentés.

(…)

Sauf disposition contraire des statuts, la voix du président de séance est prépondérante en cas de partage.

On se retrouve sur YouTube pour notre prochain cours lundi prochain à 9h30!

Bruno Dondero

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Devoir de cohérence de l’administrateur de filiale et convention implicite de vote (Cass. com., 22 mai 2019, n° 17-13565, P+B+R)

Très intéressant arrêt que celui rendu par la Chambre commerciale de la Cour de cassation le 22 mai dernier, et destiné à une large, très large publication : les deux Bulletins et le Rapport annuel (n° 17-13.565). Curieusement, l’arrêt n’est pas siglé « I », ce qui n’empêche pas qu’on puisse le trouver sur le site internet de la Cour de cassation, parmi les arrêts publiés au Bulletin. En synthèse, la Cour rappelle le devoir de loyauté de l’administrateur et en tire les conséquences dans le cadre d’un groupe de sociétés, en imposant au dirigeant ce que l’on peut appeler un devoir de cohérence et de suivi, au niveau des filiales, des décisions prises par la mère. L’arrêt est aussi intéressant, nous semble-t-il en ce qu’il exprime l’idée d’une convention de vote implicite.

La Safa était une société par actions simplifiée (SAS) dont deux personnes physiques portant le même nom, les A…, étaient les associés majoritaires (la Cour de cassation dit « actionnaires majoritaires »), étant précisé que la Safa était dotée d’un conseil d’administration. Au sein du conseil d’administration de la Safa siégeaient aussi un couple d’administrateurs, M. C… et Mme C…

La Safa contrôlait, avec une autre société, trois filiales, CSA, CESA et la société Dordognaise, dont il fallait désigner les organes de direction. Précision importante : ces trois sociétés avaient chacune un conseil d’administration, et l’on y retrouvait le couple C…

Le 27 juin 2014, le conseil de la Safa décidait, par une décision prise à la majorité, que MM. A… se porteraient respectivement candidats à la présidence ou à la direction générale des sociétés CSA et CESA ainsi qu’à la direction générale de la société Dordognaise. Cette décision ayant été prise au niveau de la société contrôlante, les choses ne se passaient toutefois pas comme souhaité au niveau des sociétés contrôlées, puisque lors des conseils d’administration des filiales, les C… s’opposaient à la nomination des A… aux organes de direction. Ils allaient d’ailleurs plus loin, puisqu’ils se faisaient même élire à ces postes !

La Safa mettait alors en jeu leur responsabilité, en invoquant un manquement des époux C… au devoir de loyauté qui s’imposait à eux en leur qualité d’administrateurs.

Il semble que le juge de première instance avait écarté la responsabilité des administrateurs C…, mais la cour d’appel saisie du litige la retenait par un arrêt infirmatif. La Chambre commerciale de la Cour de cassation, sur pourvoi formé par les C…, casse l’arrêt d’appel pour n’avoir pas fait la recherche qui était demandée, relative à l’intérêt social.

L’arrêt commenté nous offre trois facettes.

La plus immédiate est le petit manuel qu’il contient à destination de l’administrateur d’une société filiale (I). Un peu moins immédiate, mais très perceptible, est la question de l’importance donnée à l’intérêt social des sociétés concernées (II). Plus difficilement perceptible, mais sans doute utile pour comprendre la décision est l’idée d’une convention implicite de vote (III).

I – Petit manuel à l’usage de l’administrateur de filiale.

La Chambre commerciale de la Cour de cassation formule un attendu de principe, et c’est là le plus important : « Attendu que si l’administrateur d’une société exerce en principe librement son droit de vote, dans l’intérêt de la société, le devoir de loyauté auquel l’administrateur d’une société-mère est tenu à l’égard de celle-ci l’oblige, lorsqu’une décision est votée par le conseil d’administration de cette société, à voter dans le même sens au sein du conseil d’administration de la filiale, sauf lorsque cette décision est contraire à l’intérêt social de cette filiale ».

L’attendu peut se décomposer en trois propositions :

(1) l’administrateur d’une société exerce en principe librement son droit de vote, dans l’intérêt de la société ;

(2) Dérogation au principe (1) : le devoir de loyauté auquel l’administrateur d’une société-mère est tenu à l’égard de celle-ci l’oblige, lorsqu’une décision est votée par le conseil d’administration de cette société, à voter dans le même sens au sein du conseil d’administration de la filiale ;

(3) Dérogation au principe (2) : celui-ci ne s’applique pas lorsque cette décision est contraire à l’intérêt social de cette filiale.

Les règles (1) et (3) n’apportent aucune surprise : l’administrateur d’une société doit avoir en tête l’intérêt de celle-ci, et cela prime sur tout. Cela prime, par exemple, même si ce n’était pas la question posée ici, sur la convention de vote qui lierait l’administrateur, si celui-ci venait à considérer que l’exécution de la convention de vote est contraire à l’intérêt de la société.

Plus originale que ces règles (1) et (3) est en revanche la proposition intermédiaire, la proposition (2) selon laquelle « le devoir de loyauté auquel l’administrateur d’une société-mère est tenu à l’égard de celle-ci l’oblige, lorsqu’une décision est votée par le conseil d’administration de cette société, à voter dans le même sens au sein du conseil d’administration de la filiale ». C’est le devoir de loyauté de l’administrateur envers la société-mère dont il est le dirigeant qui est à l’origine d’un devoir de cohérence, d’une obligation d’assurer le suivi, au niveau des sociétés filiales, des décisions de la mère.

Bien sûr, parce que le groupe de sociétés est composé de sociétés qui sont des personnes morales autonomes, il ne saurait être oublié que chaque société du groupe a son intérêt propre. Les dirigeants des filiales doivent donc composer avec cette situation : ils doivent rechercher l’intérêt de la société filiale, mais ils ne sauraient pour autant faire abstraction de son appartenance au groupe. C’est ici que prend naissance l’intéressante théorie de l’intérêt de groupe, qui écarte la commission de l’infraction d’abus des biens d’une société, alors même que le strict intérêt de cette société n’aurait pas été respecté.

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Et l’intérêt des sociétés du Groupe W, cher Largo ?

II – L’importance de l’intérêt social.

A l’heure de savoir si un dirigeant, qu’il soit administrateur ou dirigeant exécutif, a bien agi, il faut s’interroger sur la conformité de ses actes à l’intérêt de la société. La loi PACTE du 22 mai 2019 ne dit pas autre chose lorsqu’elle complète l’art. 1833 du Code civil par un nouvel alinéa aux termes duquel « La société est gérée dans son intérêt social, en prenant en considération les enjeux sociaux et environnementaux de son activité ».

A la lecture des motifs de l’arrêt d’appel, on constate que les administrateurs condamnés n’avaient pas agi sans alléguer une raison : ils plaidaient que l’intérêt de la filiale « leur dictait précisément de ne pas soutenir la candidature de D…A… à la direction des filiales, candidature qui ne leur paraissait pas souhaitable, compte tenu de la mésentente entre lui et J… ». Ils avaient d’ailleurs fait preuve de cohérence en votant, au conseil d’administration de la Safa, contre la désignation des A… dans les filiales. Du moins, c’est ce qu’ils soutenaient, sans que la cour d’appel ait été convaincue, faute pour le procès-verbal du conseil d’administration de rapporter la preuve de cette prétendue opposition. Ce débat était un rappel sur l’utilité à apporter à la rédaction au PV du conseil, particulièrement lorsque l’on entend que soit établie la preuve de l’opposition à une décision (rapp. Cass. com., 30 mars 2010, Crédit martiniquais).

La cour d’appel avait considéré que la responsabilité des administrateurs de la filiale était engagée pour manquement à leur devoir de loyauté, dès lors qu’ils auraient été « tenus au respect des décisions collectives prises régulièrement et non entachées d’abus de droit ». L’arrêt d’appel est cependant cassé pour défaut de base légale au regard des articles L. 227-8 et L. 225-251 du Code de commerce, textes relatifs respectivement à la responsabilité du dirigeant de SAS et du dirigeant de SA. La cour d’appel aurait dû « rechercher, comme il lui était demandé, si la décision prise par le conseil d’administration de la société Safa n’était pas contraire à l’intérêt social de ses filiales ».

C’est dire ici que, vote du conseil d’administration de la société mère ou pas, et double casquette d’administrateur de la mère et de la filiale ou pas, on ne saurait retenir la responsabilité de l’administrateur de la filiale si le vote pris, quoique désobéissant à la décision prise par la société mère, était favorable – ou n’était pas défavorable – à l’intérêt de la société filiale.

III – Une convention implicite de vote ?

On peine initialement à voir dans l’arrêt de la Cour de cassation une décision facilement transposable à beaucoup d’autres situations… à moins d’étendre le propos aux conventions de vote.

Le groupe dont il était question était composé de sociétés dotées d’un conseil d’administration, et une décision du conseil d’administration de la mère devait décider de la manière dont statueraient les conseils d’administration des filiales. Dans cette organisation, les conseils d’administration des filiales procédaient alors à la désignation du dirigeant de la filiale.

C’est là que la situation est particulière. Lorsque les conseils d’administration des filiales prennent des décisions, ils le font, sauf organisation statutaire particulière, indépendamment des décisions prises antérieurement dans le cadre des organes de la société mère. En clair, il est concevable que les statuts d’une filiale constituée sous forme de SAS prévoient que la désignation du président de la filiale fasse intervenir un organe de la société mère, ou que l’on mette en place des « organes de groupe » particuliers. Mais cette configuration n’est pas si fréquente que cela, à notre connaissance, et elle n’est pas reproductible dans des formes sociales, comme la SA, où l’attribution au conseil d’administration du pouvoir de désignation des organes de direction exécutive a valeur légale.

L’arrêt prend cependant une autre portée si l’on considère que le vote intervenu dans le conseil d’administration de la mère avait valeur de convention de vote – une convention implicite de vote en somme.

La pratique recourt fréquemment, dans le cadre de pactes particulièrement, à des engagements pesant sur les associés ou les membres d’organes collégiaux, de voter dans un certain sens lors des assemblées, conseils d’administration ou de surveillance, comités, etc. L’idée qui est exprimée implicitement dans la proposition selon laquelle « le devoir de loyauté auquel l’administrateur d’une société-mère est tenu à l’égard de celle-ci l’oblige, lorsqu’une décision est votée par le conseil d’administration de cette société, à voter dans le même sens au sein du conseil d’administration de la filiale », consisterait à reconnaître une convention de vote pesant sur l’administrateur de la filiale, du fait de ses liens avec la société mère.

Parce que le conseil d’administration de la mère a arrêté une position déterminée sur les présidents et DG à désigner dans le cadre de la filiale, le vote de l’administrateur de la filiale n’est plus libre, mais cet administrateur doit donner effet à la décision prise dans le cadre de la mère, sous réserve de protéger l’intérêt de la société – filiale – dont il est administrateur, à l’identique de l’obligation qui pèserait sur cet administrateur s’il était partie à une convention de vote.

Bruno DONDERO

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Cours de droit des sociétés 2: la gouvernance de la société EssilorLuxottica, ou « Monsieur le V-P-DGD, bonjour! »

Nous nous retrouvons demain de 17h à 20h dans notre amphi de Paris 1 Panthéon – Sorbonne et sur FacebookLive, comme d’habitude. Avant que nous ne nous lancions dans l’étude des sociétés de personnes, un coup de projecteur sur la gouvernance d’une société cotée, la société EssilorLuxottica.

Vous noterez que cette société a un nom étonnant, en forme de hashtag, avec cette majuscule au milieu. En réalité, cela s’explique par l’origine de cette société, qui résulte du rapprochement de deux entreprises : Essilor, société française, et Luxottica, société italienne.

Ces deux sociétés se sont rapprochées, et elles ont constitué la société EssilorLuxottica, qui est cotée à Paris. Juridiquement, l’opération n’a pas été la constitution d’une nouvelle société, en réalité. De cet article en italien, on apprend que les actions Luxottica détenues par la société Delfin ont été apportées à la société Essilor. On parle ici ou là de « fusion », mais il ne semble pas que l’opération ait été juridiquement une fusion, de ce que l’on peut lire. Il n’y a pas eu disparition de la société Luxottica. Essilor a reçu les actions Luxottica, et Essilor a changé de dénomination sociale pour devenir EssilorLuxottica. Le groupe français et le groupe italien existent toujours, mais les activités sont exercées par la société EssilorLuxottica, avec comme premier actionnaire la société Delfin.

Comment EssilorLuxottica, société anonyme de droit français, cotée, est-elle dirigée ?

Essilor

 

 

Sur le site de la société, on trouve des indications intéressantes:

Essilor2

La question est de savoir comment le droit français des sociétés anonymes, dont on a vu qu’il ne laissait que peu de place à la volonté des parties, accueille le mandat de « Vice-Président-Directeur Général Délégué ».

La question se pose d’autant plus que les relations entre le P-DG et le V-P-DGD se sont dégradées. Le P-DG, l’Italien Leonardo Del Vecchio, indique ainsi au Figaro« Dès la première assemblée générale du nouveau groupe, le 29 novembre, [Hubert Sagnières, V-P-DGD d’EssilorLuxottica et P-DG d’Essilor] s’est comporté comme si Essilor avait racheté Luxottica« . Mais si les actions Luxottica sont apportées à une société Essilor, n’est-ce pas comme un achat ? (je pose la question pour en discuter demain).

Autre question: le partage des sièges du conseil d’administration qui a été mis en place ne laisse-t-il pas la possibilité à d’autres actionnaires de proposer des candidats ?

Essilor3

On parle de toutes ces questions pendant notre cours demain!

Bruno DONDERO

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Cours de droit des sociétés 2: la situation de l’administrateur

Demain en cours de droit des sociétés 2, nous continuerons l’étude de la direction des sociétés anonymes. Nous nous intéresserons à une affaire dont la presse a parlé cette semaine, qui oppose les sociétés SCOR et Covéa, et qui tient notamment au fait que ces deux sociétés ont eu un dirigeant commun. Précisément, le PDG de Covéa, M. Thierry Derez, a été administrateur de SCOR jusqu’en novembre 2018.

SCOR lui reproche d’avoir transmis des informations confidentielles à Covéa, informations que M. Derez aurait obtenues de par sa position d’administrateur. C’est ce qu’indique le communiqué de presse de SCOR en date du 29 janvier 2019.

 

Communiqué SCOR

Nous évoquerons la question des conflits d’intérêts, ce qui nous permettra de faire le lien avec plusieurs mécanismes du droit de la SA, et notamment le dispositif sur les conventions réglementées.

Nous verrons aussi la question de la confidentialité des informations dont disposent les dirigeants et de l’utilisation qu’ils sont autorisés à en faire.

Précision: SCOR a la forme de société européenne (SE), tandis que Covéa est en réalité un groupe ayant à sa tête une société de groupe d’assurance mutuelle (SGAM).

Nous nous retrouvons demain lundi à partir de 17h, en amphi et sur Facebook en direct!

Bruno DONDERO

 

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Cours de droit des sociétés 2: comprendre l’évolution de la gouvernance de Renault SA

Nous continuerons demain à partir de 17h l’étude du droit de la société anonyme (SA). Nous nous arrêterons sur les pouvoirs des dirigeants dans la SA à conseil d’administration. Nous reviendrons sur la gouvernance de la société Renault.

Nous avions vu il y a quelques semaines les raisons pour lesquelles cette société avait choisi d’avoir un P-DG, c’est-à-dire d’avoir investi une seule et même personne des fonctions de président du conseil d’administration et de directeur général. Il s’agissait à l’époque de M. Carlos Ghosn.

Nous verrons demain l’évolution que vient de connaître la gouvernance de Renault, en nous intéressant au Communiqué de presse diffusé par la société le 24 janvier 2019.

communiqué 24 01 2019 renault

Nous nous retrouvons pour en parler demain lundi en amphi et/ou sur Facebook Live, de 17h à 20h.

A demain!

Bruno DONDERO

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Consentir une garantie non autorisée: la responsabilité du dirigeant (Cass. com., 8 nov. 2017)

La Chambre commerciale de la Cour de cassation a rendu le 8 novembre 2017 (n° 16-10626) un arrêt qui mérite un commentaire rapide sur ce blog (un commentaire plus détaillé est à venir au Bulletin Joly Sociétés). Il est jugé que le dirigeant d’une société anonyme (SA) qui consent une garantie sans l’autorisation préalable du conseil d’administration requise par l’article L. 225-35 du Code de commerce ne commet en principe pas une faute séparable de ses fonctions.

Deux compagnies aériennes, les sociétés Air horizons et XL Airways, signaient le 2 août 2005 un contrat d’affrètement avec le voyagiste Marmara. Ce contrat prévoyait notamment que la société Air horizons fournirait des avions afin d’assurer les vols avec l’Egypte. Une particularité de la relation ainsi mise en place tenait à ce que Marmara devait contractuellement régler l’intégralité des prestations à la société XL Airways, qui s’engageait à rétrocéder à Air horizons la part lui revenant.

 

Quelques jours après la conclusion de cette première convention, le 22 septembre 2005, la société de banque Vendôme capital Holding entrait en piste et accordait une ouverture de crédit à la société Air horizons afin de lui permettre de faire face aux obligations résultant du contrat d’affrètement. Le même jour étaient conclues :

– une convention de nantissement d’un compte de dépôt à terme par la société XL Airways, représentée par M. X…, président du conseil d’administration et directeur général (P-DG), au profit de la banque, ayant pour objet de garantir le paiement des sommes dues par la société Air horizons à la banque au titre de l’ouverture de crédit ;

– une convention de délégation de créance par laquelle la société XL Airways, débitrice de la société Air horizons, s’obligeait à payer à la banque les sommes dues à celle-ci au titre de l’ouverture de crédit.

Par la suite, la société Air horizons était mise en redressement puis en liquidation judiciaires. La banque déclarait la créance née du contrat de crédit, puis elle réalisait le nantissement. La société XL Airways assignait alors la banque en restitution de la somme perçue, faisant valoir que cette sûreté lui était inopposable en l’absence d’autorisation de son conseil d’administration.

Un arrêt rendu par la Cour de cassation en 2013 (Cass. com., 15 janv. 2013, n° 11-28.173, Bull. IV, n° 10) statuait sur l’exigence d’une autorisation préalable du conseil d’administration, et jugeait que la délégation de créance consentie ne constituait pas une garantie soumise à autorisation du conseil.

L’arrêt de 2017 traite d’un autre aspect du litige. La banque avait soutenu que le P-DG de la société XL Airways avait engagé sa responsabilité personnelle en signant une convention de nantissement inopérante, et elle l’avait appelé en intervention forcée pour obtenir la réparation de son préjudice. La cour d’appel avait rejeté sa demande. La banque avait donc formé un pourvoi en cassation contre cette partie de l’arrêt, qui est rejeté par la décision commentée.

Ecran de la personnalité morale et faute séparable des fonctions.

La solution retenue par la Cour de cassation consiste à subordonner la responsabilité personnelle du dirigeant à l’égard des tiers à une faute séparable de ses fonctions, conformément à une jurisprudence parfaitement établie. Comme le juge la Cour de cassation depuis quinze ans maintenant, et comme elle le répète dans son arrêt du 8 novembre 2017, « la responsabilité personnelle d’un dirigeant à l’égard des tiers ne peut être retenue que s’il a commis une faute séparable de ses fonctions » et « il en est ainsi lorsque le dirigeant commet intentionnellement une faute d’une particulière gravité, incompatible avec l’exercice normal des fonctions sociales ». C’était déjà la formule retenue, à la virgule près, par l’arrêt SATI du 20 mai 2003 (Cass. com., 20 mai 2003, n° 99-17092, Bull. IV, n° 84).

On ne reviendra pas ici sur ce principe bien connu d’immunité découlant de l’écran de la personnalité morale de la société, qui préexistait à l’arrêt SATI. Cette immunité ne joue que pour les actions intentées par les tiers, mais tant que le dirigeant ne commet pas une faute séparable de ses fonctions, le principe tient bon. L’arrêt SATI avait formulé une définition de la faute séparable des fonctions. Ne pas commettre une faute séparable des fonctions signifie ne pas commettre (1) de manière intentionnelle (2) une faute d’une particulière gravité et qui soit (3) incompatible avec l’exercice normal des fonctions sociales (les deux dernières conditions n’en forment vraisemblablement qu’une).

 

La faute consistant à consentir une garantie non autorisée : pas détachable ?

La Cour de cassation avait déjà retenu par son arrêt Outinord du 20 octobre 1998 que le dirigeant qui consent une garantie sans que le conseil d’administration l’ait autorisée ne commet pas de faute séparable de ses fonctions. La Cour de cassation avait jugé que « c’est à bon droit que la cour d’appel a retenu que si M. X… avait commis une faute en ne vérifiant pas qu’il détenait toujours le pouvoir de consentir des cautionnements au nom de la société, cette faute n’était pas séparable de ses fonctions de directeur général et qu’il n’était ainsi pas établi que sa responsabilité personnelle était engagée ». Il était tentant d’en déduire que la faute consistant à ne pas requérir l’autorisation du conseil d’administration n’était pas détachable des fonctions. Mais il fallait tout de même avoir égard au fait que le dirigeant en question avait un temps été autorisé à consentir des cautionnements, avals et garanties, et qu’il avait omis de vérifier que l’autorisation en question était toujours valable – elle ne l’était plus.

L’arrêt commenté rendu en 2017 juge quant à lui qu’ « ayant estimé que la seule circonstance que M. X… ait signé la convention de nantissement pour le compte de la société XL Airways dont il était le président et directeur général cependant qu’il n’était pas habilité à le faire ne démontrait pas le caractère délibéré de la faute et que la banque n’établissait, de la part de M. X…, aucune manœuvre, la cour d’appel en a exactement déduit qu’il n’avait pas commis de faute séparable de ses fonctions ». Il va en cela plus loin que l’arrêt Outinord.

 La Cour de cassation ne mentionnant pas la circonstance d’une caducité de l’autorisation, puisque celle-ci n’avait jamais existé, l’immunité dont bénéficie le dirigeant concerne donc aussi l’hypothèse d’une absence totale d’autorisation. L’arrêt commenté constitue déjà sur ce point une avancée par rapport à l’arrêt Outinord, même si l’on tendait à ne pas distinguer entre l’absence complète d’autorisation et la caducité d’une autorisation donnée.

Mais il est tout de même envisageable que le dirigeant qui consent une garantie sans autorisation puisse engager sa responsabilité personnelle par la commission d’une faute séparable de ses fonctions. Ce sera le cas s’il commet des « manœuvres », terme mentionné par la Cour de cassation pour approuver les juges d’avoir pris en compte le fait qu’aucune manœuvre n’était établie à la charge du P-DG de la société XL Airways. L’hypothèse se conçoit aisément : une société anonyme confortera le crédit d’un tiers en se portant garante de ses engagements à l’égard d’un créancier, puis lorsque le créancier tentera de mettre en jeu la garantie, la société se prévaudra de l’absence d’autorisation de son conseil d’administration pour faire déclarer la garantie inopposable. Si le dirigeant ayant signé l’acte de garantie avait conscience de l’inopposabilité de celle-ci au moment où il la consentait, et si la démarche visait à conforter le crédit du tiers par une garantie dont le vice était connu ab initio, la qualification d’escroquerie se vérifie : tromper un tiers par l’emploi de manœuvres frauduleuses pour le déterminer à remettre des fonds (art. 313-1 Code pénal). Même en l’absence de qualification pénale, la responsabilité civile du dirigeant peut être retenue. Le fait de tromper les tiers sur la solvabilité de la société est d’ailleurs jugé par la Cour de cassation comme constituant une faute séparable des fonctions. C’était la solution retenue par l’arrêt SATI, qui concernait une double mobilisation des factures détenues par la société sur ses clients, et cela est confirmé par des décisions plus récentes (V. ainsi Cass. com., 5 juil. 2017, n° 15-22381, jugeant qu’une cour d’appel avait légalement justifié sa décision en écartant la qualification de faute séparable des fonctions en jugeant qu’il n’était pas établi que le dirigeant d’une société « ait volontairement cherché à tromper [le tiers] sur la solvabilité de la société qu’il dirigeait »).

Dans notre affaire, la banque plaidait devant la Cour de cassation que le P-DG de la société garante avait signé un acte de nantissement comportant une déclaration stipulant que « le constituant a pleine capacité et dispose de tous pouvoirs et autorisations de ses organes sociaux compétents », ce qui aurait été de nature à induire en erreur le bénéficiaire de la garantie. Mais les manœuvres ne sont pas retenues, la clause étant sans doute estimée davantage être de style que créatrice d’obligations…

En conclusion, la solution retenue est donc protectrice du dirigeant, et il est concevable qu’elle puisse être étendue à d’autres hypothèses similaires, qu’il s’agisse de l’octroi d’une garantie sans l’autorisation prévue par les statuts dans le cadre d’une SAS, ou plus généralement du non-respect de l’autorisation d’un autre organe, que celle-ci soit requise par la loi ou par les statuts. Il est vrai cependant que la question se posera moins lorsque le défaut d’autorisation sera inopposable au tiers et que celui-ci pourra ignorer le fait que le dirigeant n’avait pas obtenu les autorisations requises.

Bruno DONDERO

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L’administrateur geek et la loi Sapin 2

Le projet de loi Sapin 2 (loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016) comportait, dans la version adoptée en lecture définitive par l’Assemblée nationale, au sein de son Titre VII intitulé « De l’amélioration du parcours de croissance pour les entreprises », un article 134. Celui-ci entendait ajouter un alinéa à l’article L. 225-18 du Code de commerce, disposition relative à la désignation des administrateurs.

Cet alinéa disposait que « L’assemblée générale ordinaire peut désigner un administrateur chargé du suivi des questions d’innovation et de transformation numérique ». Le Conseil constitutionnel a toutefois censuré l’alinéa que le législateur entendait consacrer à « l’administrateur numérique », par sa décision n° 2016-741 DC du 8 décembre 2016.

Ce faisant, le Conseil constitutionnel apparaît remettre en cause ce qui aurait été une manifestation supplémentaire du courant de diversification des administrateurs (I). Sa décision mérite cependant d’être examinée de plus près (II). On formulera enfin quelques observations complémentaires (III).

I – Le courant de diversification des administrateurs.

Le conseil d’administration avait été pensé, aux termes de la loi du 24 juillet 1966, comme un organe collégial. Dans cet organe, pas une tête ne devait dépasser, à l’exception de celle du président du conseil. Cette approche était tout de même à nuancer, puisque l’attribution de missions particulières à tel ou tel administrateur était expressément prévue par des textes légaux ou réglementaires.

L’article L. 225-46 du Code de commerce disposait déjà qu’ « Il peut être alloué, par le conseil d’administration, des rémunérations exceptionnelles pour les missions ou mandats confiés à des administrateurs ». Surtout, l’article R. 225-49 du Code de commerce prévoyait que « Le conseil d’administration peut conférer à un ou plusieurs de ses membres ou à des tiers, actionnaires ou non, tous mandats spéciaux pour un ou plusieurs objets déterminés », dans un premier alinéa, le second alinéa étant quant à lui relatif à la création de comités spécialisés. Rappelons enfin que le Code Afep-Medef énonce que « Lorsque le conseil décide de confier des missions particulières à un administrateur, notamment en qualité d’administrateur référent ou de vice-président, en matière de gouvernance ou de relations avec les actionnaires, ces missions ainsi que les moyens et prérogatives dont il dispose, sont décrites dans le règlement intérieur (…) » (art. 6.3).

La diversification des administrateurs est cependant un phénomène qui a été croissant ces dernières années, puisque, au sein du conseil, on a vu apparaître des administrateurs qui se fondent moins que les autres dans le paysage. Ce n’est pas tant par leurs pouvoirs qu’ils se distinguent des autres administrateurs, que par les raisons et les modalités de leur nomination. Certains administrateurs sont ainsi nommés par les salariés (art. L. 225-27 C. com.) ou représentent ceux-ci sans nécessairement être nommés directement par eux (art. L. 225-27-1 et s. C. com.). La loi Copé-Zimmermann sur la parité au sein des conseils fait quant à elle émerger la nécessité de désigner des administrateurs / administratrices en fonction de leur sexe (art. L. 225-17 et L. 225-18-1 C. com.). D’autres administrateurs sont quant à eux nommés pour leur indépendance et leurs compétences particulières en matière financière ou comptable (art. L. 823-19 C. com.). Si l’on sort du cadre légal strict, on rencontre d’autres figures comme celle de l’administrateur référent (mentionné notamment par le Code Afep-Medef, art. 6.3 préc.), etc.

Il n’était donc pas absurde que ce mouvement de diversification se poursuive et qu’il soit prévu qu’un administrateur serait nommé en raison de son appétence, réelle ou supposée, préexistante ou postérieure à sa désignation, pour le numérique et plus largement pour l’innovation. Celui-ci aurait été peut-être le plus jeune des administrateurs, ou le plus geek… Rappelons que ce terme, entré dans l’édition 2010 du Dictionnaire Larousse, désigne un ou une « fan d’informatique, de science-fiction, de jeux vidéo, etc., toujours à l’affût des nouveautés et des améliorations à apporter aux technologies numériques ».

Simplement, pour introduire cette nouvelle figure au sein du conseil d’administration, encore fallait-il ne pas se tromper de ton, indépendamment du fond de la mesure mise en place. Et c’est bien le ton employé par les rédacteurs de l’article 134 qui cause la perte de l’administrateur numérique…

II – La censure intervenue.

Le Conseil constitutionnel juge l’article 134 du projet de loi Sapin 2 tout simplement « contraire à la Constitution ». La mise en place d’un administrateur chargé du suivi des questions d’innovation et de transformation numérique porterait-elle donc atteinte à des normes de nature constitutionnelle ?

En 1991, le Conseil d’Etat énonçait dans son rapport annuel une formule qui a marqué les esprits : « Quand le droit bavarde, le citoyen ne lui prête plus qu’une oreille distraite ». La concision et l’élégance de cette formule, qui semble empruntée à Carbonnier, ne doivent pas faire oublier que la fonction de la loi est bien d’édicter des normes. La loi qui bavarde n’est peut-être pas écoutée, mais elle devrait même être censurée, comme le Conseil constitutionnel l’a déjà fait à plusieurs reprises.

Dans une décision n° 2005-512 DC du 12 avril 2005 relative à la loi d’orientation et de programme pour l’avenir de l’école, a été ainsi censuré un article qui entendait affirmer « l’objectif de l’école » (cons. n° 16 et 17). Le projet de loi adopté par le Parlement disposait ainsi que « L’objectif de l’école est la réussite de tous les élèves. – Compte tenu de la diversité des élèves, l’école doit reconnaître et promouvoir toutes les formes d’intelligence pour leur permettre de valoriser leurs talents. – La formation scolaire, sous l’autorité des enseignants et avec l’appui des parents, permet à chaque élève de réaliser le travail et les efforts nécessaires à la mise en valeur et au développement de ses aptitudes, aussi bien intellectuelles que manuelles, artistiques et sportives. Elle contribue à la préparation de son parcours personnel et professionnel ». Ces belles déclarations ont cependant été jugées « manifestement dépourvues de toute portée normative », et ont par conséquent été censurées (cons. n° 17).

C’est ce même reproche qui est retenu, à la suite d’une requête faite par des sénateurs, par la décision n° 2016-741 DC du 8 décembre 2016 (cons. n° 96 à 99). Il est rappelé qu’aux termes de l’article 6 de la Déclaration de 1789, « La loi est l’expression de la volonté générale… », et le Conseil constitutionnel énonce qu’ « Il résulte de cet article comme de l’ensemble des autres normes de valeur constitutionnelle relatives à l’objet de la loi que, sous réserve de dispositions particulières prévues par la Constitution, la loi a pour vocation d’énoncer des règles et doit par suite être revêtue d’une portée normative » (cons. n° 98). Il en est déduit que « Les dispositions de l’article 134 de la loi déférée, qui se bornent à conférer à l’assemblée générale ordinaire d’une société anonyme le pouvoir de confier à un administrateur la charge de suivre des évolutions technologiques, sont dépourvues de portée normative. Dès lors, cet article est contraire à la Constitution » (cons. n° 99).

La disposition censurée ne faisait en effet qu’émettre une suggestion, que l’assemblée générale des actionnaires pouvait suivre ou non. On peut donc se dire que ce n’était pas là le rôle du législateur.

III – Observations complémentaires.

Deux observations complémentaires méritent encore d’être faites.

La première est relative à la place que l’alinéa censuré aurait dû occuper au sein de l’article L. 225-18 du Code de commerce. Ce texte donne pouvoir à l’assemblée générale constitutive, à l’assemblée générale ordinaire et aux statuts pour nommer les administrateurs d’une société anonyme, ainsi qu’à l’assemblée générale extraordinaire en cas de fusion ou de scission. Il formule par ailleurs des règles relatives à la réélection et à la révocation. Il se termine enfin par un alinéa aux termes duquel « Toute nomination intervenue en violation des dispositions précédentes est nulle », à l’exception des hypothèses de cooptation. Le nouvel alinéa, relatif à l’administrateur numérique, aurait donc été d’autant moins doté de force obligatoire que la sanction de la nullité ne s’appliquait même pas, puisque les « dispositions précédentes » n’incluaient pas le nouvel alinéa. Placer le nouvel alinéa relatif à l’administrateur numérique parmi les dispositions sanctionnées par la nullité aurait été un moyen de donner plus de force au texte. Cela aurait eu pour conséquence de donner une compétence exclusive à l’assemblée générale ordinaire, puisque la violation de celle-ci aurait été sanctionnée par la nullité. On comprend cependant que cela aurait été plus problématique qu’utile, car les stipulations des statuts ou des règlements intérieurs prévoyant qu’une mission relative à l’innovation et au numérique pourrait être confié à un administrateur auraient été menacées. La solution la moins gênante consistait donc bien à placer le nouvel alinéa à la fin de l’article L. 225-18. De la sorte, on ne faisait qu’ajouter une prérogative à celles dont dispose déjà l’assemblée générale ordinaire.

La seconde observation est relative à l’utilité du texte. Tout de même, n’y avait-il aucun ajout réel résultant du nouvel alinéa ? Qui ne lirait que le texte modifié pourrait penser que la mesure était en réalité utile, au-delà de la simple suggestion. L’assemblée générale ordinaire des actionnaires s’étant vu reconnaître le pouvoir de nommer les administrateurs par le premier alinéa de l’article L. 225-18 du Code de commerce, il n’allait pas de soi qu’elle ait la possibilité d’assigner des missions particulières à tel ou tel administrateur. Dès lors, il appartenait au législateur de conférer expressément ce pouvoir à l’assemblée.

Mais c’était oublier qu’un texte préexistant, l’article L. 225-98 du Code de commerce, dispose déjà depuis longtemps que l’assemblée générale ordinaire « prend toutes les décisions autres que celles [relatives à la modification des statuts et au changement de nationalité de la société] ». C’est donc dans le cadre de l’article L. 225-98 que l’attribution d’une mission liée au numérique et à l’innovation pouvait prendre place sans difficulté. Ou alors, c’était la figure d’un administrateur doté d’un statut différent de celui des autres que le législateur voulait faire émerger, mais il fallait alors prévoir ce statut, au moins dans ses grandes lignes, et ne pas se contenter de renvoyer ce travail de définition à l’assemblée des actionnaires…

Bruno Dondero

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Quand l’Etat force la porte des conseils d’administration (ordonnance n° 2014-948 du 20 août 2014).

La loi de simplification et de sécurisation de la vie des entreprises (SSVE) du 2 janvier 2014 annonçait des réformes importantes en droit des procédures collectives et en droit des sociétés, notamment. S’agissant du premier domaine, celui des procédures collectives, l’article 2 de la loi a ainsi conduit à l’adoption de l’ordonnance du 12 mars 2014 et tout récemment à celle du 26 septembre. Le droit des sociétés a quant à lui été réformé par l’ordonnance du 31 juillet dernier.

Un article 10 de la loi SSVE annonçait cependant d’autres mesures, touchant des sociétés particulières. Le gouvernement se voyait ainsi habilité à statuer par ordonnance pour :

« 1° Simplifier et rapprocher du droit commun des sociétés les textes régissant les entreprises dans lesquelles l’Etat ou ses établissements publics détiennent seuls ou conjointement, directement ou indirectement, une participation, majoritaire ou minoritaire ;

2° Assouplir et adapter les règles relative à la composition, au rôle et au fonctionnement des conseils, à la désignation, au mandat et au statut des personnes appelées à y siéger, sans remettre en cause la représentation des salariés, ainsi qu’à la désignation des dirigeants ;

3° Clarifier les règles concernant les opérations en capital relatives à ces entreprises, sans modifier les dispositions particulières imposant un seuil minimum de détention du capital de certaines de ces entreprises par l’Etat ou ses établissements publics ;

4° Adapter les compétences de la Commission des participations et des transferts ».

Au-delà d’une faute d’accord dans le 2°, les mesures annoncées ne faisaient pas particulièrement tressaillir le lecteur : simplifier, assouplir, adapter, rapprocher du droit commun, clarifier… Voilà beaucoup d’expressions qui semblaient annoncer des mesures peu révolutionnaires.

L’ordonnance n° 2014-948 du 20 août 2014 est cependant assez étonnante. Certes, une partie du dispositif de l’ordonnance peut être lue comme n’étant que l’application des règles de droit commun aux sociétés dont tout ou partie du capital est détenu par l’Etat et ses établissements publics. Quand l’article 1er de l’ordonnance dispose que les sociétés commerciales dans lesquelles d’Etat ou ses établissements publics détiennent seuls ou conjointement, directement ou indirectement, une participation au capital « sont soumises aux dispositions du Code de commerce et des autres lois générales ou particulières qui les régissent dans la mesure où ces dispositions ne sont pas contraires à [l’ordonnance] », ou quand sont édictées par les articles 10 à 14 un certain nombre de règles relatives au fonctionnement des conseils des sociétés dont plus de la moitié du capital est détenu par l’Etat et ses établissements publics, on est effectivement dans l’optique de clarifier et de soumettre les sociétés à participation publique au droit commun.

Mais l’ordonnance contient plusieurs dispositions qui retiennent l’attention. L’une prolonge un texte antérieur, et est relative à la désignation d’un représentant de l’Etat (I). Une autre, réellement remarquable, est relative aux sièges désormais réservés à l’Etat au sein des conseils (II).

I – La désignation d’un représentant de l’Etat… par l’Etat lui-même.

La loi relative aux nouvelles régulations économiques (NRE) du 15 mai 2001 avait mis en place, en son article 139, une représentation de l’Etat au sien du conseil d’administration des sociétés du secteur privé dont 10% au moins du capital était détenu par l’Etat et un ou plusieurs établissements du secteur public. Précédemment, la représentation de l’Etat supposait une désignation par l’organe compétent de la société concernée.

Art. 139 L. NRE (extrait) :

L’Etat peut être représenté par une ou plusieurs des personnes mentionnées au II au sein du conseil d’administration ou de surveillance ou de l’organe délibérant en tenant lieu d’une entreprise du secteur privé dans laquelle l’Etat, indirectement, et un ou plusieurs établissements publics de l’Etat, directement ou indirectement, détiennent, ensemble ou séparément, au moins 10 % du capital. La participation publique prise en compte pour apprécier si le seuil de 10 % est atteint est déterminée à partir du produit des pourcentages de participation de l’Etat et de ses établissements publics dans une même chaîne de participations majoritaires ou minoritaires.

Les représentants de l’Etat sont désignés par l’organe compétent de l’entreprise, sur proposition, selon le cas, des ministres dont ils dépendent s’ils sont agents publics de l’Etat ou des ministres de tutelle de l’établissement public ou de l’entreprise publique dont ils sont dirigeants.

Les dispositions des articles L. 225-25 et L. 225-72 du code de commerce ne leur sont pas applicables.

Les choses ont quelque peu changé avec l’ordonnance du 20 août 2014, qui dispose en son art. 4 :

I- L’Etat désigne un représentant dans les conseils d’administration, les conseils de surveillance ou les organes délibérants en tenant lieu des sociétés dont il détient directement, seul ou conjointement avec ses établissements publics, plus de la moitié du capital. Il peut également désigner un représentant dans les organes délibérants des autres sociétés dont il détient directement à lui seul plus de 10 % du capital.

L’Etat peut en outre, sur sa proposition ou avec son accord, être nommé par les organes compétents comme membre du conseil d’administration, du conseil de surveillance ou de l’organe délibérant en tenant lieu des autres sociétés dans lesquelles l’Etat ou ses établissements publics industriels ou commerciaux détiennent, directement ou indirectement, une participation. L’Etat désigne alors son représentant.
Les conditions de désignation du représentant de l’Etat sont fixées par décret en Conseil d’Etat.
II. – Les participations détenues par toute société ayant pour objet principal la détention de titres et dont la totalité du capital appartient à l’Etat sont assimilées, pour l’application du I, à des participations détenues directement par l’Etat.

Dans les hypothèses visées, c’est donc l’Etat qui désigne son représentant, et non plus les organes de la société concernée. Et ce représentant « agit avec les mêmes droits et les mêmes pouvoirs » que les autres membres de l’organe concerné, selon l’art. 5 de l’ordonnance.

Ajoutons que dans les sociétés où il dispose d’un représentant en application de l’art. 4 de l’ordonnance, l’art. 15 permet à l’Etat de désigner un commissaire du Gouvernement qui assiste avec voix consultative aux séances du conseil.

II – Les sièges réservés aux membres proposés par l’Etat.

L’article 6 de l’ordonnance met en place un dispositif remarquable. Dans les sociétés dont l’Etat détient seul directement de 10 à 50% du capital, et donc des sociétés où il est un actionnaire minoritaire ou très minoritaire, un ou plusieurs sièges du conseil d’administration, de surveillance ou de l’organe délibérant en tenant lieu sont réservés à des membres que l’Etat peut proposer.

Le texte mérite d’être reproduit :

Art. 6 de l’ordonnance du 20 août 2014 :

I- Au sein du conseil d’administration ou de surveillance ou de l’organe délibérant en tenant lieu des sociétés dont l’Etat détient seul directement de 10 % à 50 % du capital, un ou plusieurs sièges, dans la limite d’un nombre proportionnel à sa participation, sont réservés à des membres que l’Etat peut proposer. Le nombre de sièges réservés est au moins égal à deux dans les sociétés pour lesquelles le nombre de membres du conseil d’administration, du conseil de surveillance ou de l’organe délibérant en tenant lieu est supérieur à dix.

Si l’organe compétent de la société refuse la ou les personnes proposées en vertu de l’alinéa précédent, l’Etat peut nommer par lettre adressée à la société un ou plusieurs membres pour exercer à titre provisoire les fonctions de ceux dont la nomination a été refusée. Ces nominations sont soumises à la ratification de la plus prochaine « assemblée générale ordinaire », organe dont, précisons-le, toutes les sociétés ne sont pas dotées! A défaut de ratification, les délibérations prises et les actes accomplis antérieurement par le conseil ou l’organe délibérant demeurent valables. Le remplacement du membre dont la nomination n’a pas été ratifiée est assuré dans les conditions prévues au présent I.
Pour la détermination du nombre de sièges mentionnés au premier alinéa du présent I, il n’est pas tenu compte des représentants élus par le personnel salarié en application de la présente ordonnance ou des articlesL. 225-27,L. 225-27-1L. 225-79 ou L. 225-79-2 du code de commerce.
Lorsqu’un représentant de l’Etat a été désigné en application de l’article 4 de la présente ordonnance, son siège est déduit de ceux réservés à l’Etat en application du premier alinéa du présent I.
Les participations détenues par toute société ayant pour objet principal la détention de titres et dont la totalité du capital appartient à l’Etat sont assimilées à des participations détenues directement par l’Etat pour l’application du présent I.
II. – Dans les sociétés dans lesquelles l’Etat ou ses établissements publics industriels ou commerciaux, seuls ou conjointement, détiennent directement ou indirectement une participation, l’Etat peut, dans des conditions précisées par voie réglementaire, proposer aux organes compétents de ces sociétés la nomination d’un ou plusieurs membres du conseil d’administration, du conseil de surveillance ou de l’organe délibérant en tenant lieu.
III. – Les membres proposés par l’Etat en application du I ou du II du présent article peuvent, nonobstant les dispositions du 1° du I de l’article 25 de la loi du 13 juillet 1983 susvisée, avoir la qualité d’agents publics de l’Etat. Ils sont soumis aux mêmes règles que les autres membres, notamment celles issues du code de commerce. Ils représentent les intérêts de l’Etat en sa qualité d’actionnaire.
IV. – Sans préjudice des dispositions législatives et réglementaires qui leur sont applicables, les membres mentionnés au présent article peuvent bénéficier dans l’exercice de leur mandat d’une protection organisée dans les conditions prévues à l’article 11 de la loi du 13 juillet 1983 susvisée.
V. – Toute rémunération perçue par les membres désignés en vertu du présent article ayant la qualité d’agent public de l’Etat est versée au budget de l’Etat. Il en va de même de la rémunération perçue par les autres membres désignés en vertu du présent article dépassant un plafond fixé par arrêté du ministre chargé de l’économie.
VI. – Les dispositions des articles L. 225-25 et L. 225-72 du code de commerce ne leur sont pas applicables.

C’est surtout le I qui retient l’attention, puisque comme on le voit, le mécanisme est le suivant :

  • L’Etat propose des membres devant siéger au conseil ;
  • Si ces membres sont refusés par l’organe compétent de la société, alors l’Etat peut nommer quand même « un ou plusieurs membres pour exercer à titre provisoire les fonctions de ceux dont la nomination a été refusée», sans que l’on sache si ce sont les mêmes personnes qui peuvent être ainsi poussées de force au conseil ;
  • Ces nominations sont ensuite soumises à ratification de la plus prochaine assemblée générale ordinaire, qui a dû déjà statuer, au moins dans les sociétés anonymes, sur l’entrée au conseil des personnes proposées par l’Etat…

On pourra trouver que l’indication du rapport au Président de la République, selon laquelle le texte renforcerait le rôle de l’assemblée générale des actionnaires, est peu conforme à la réalité, puisque l’assemblée doit ratifier des nominations provisoires là où elle est en principe souveraine pour choisir « dès le premier jour » les administrateurs et membres du conseil de surveillance…

En tous les cas, on s’écarte assez du droit commun avec cette ordonnance, car tout actionnaire ne détenant que 10% des actions d’une société apprécierait sans doute de bénéficier de sièges réservés…

NB: l’ordonnance est complétée par un décret n° 2014-949 en date du 20 août également.

 Bruno DONDERO

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Egalité des sexes dans les conseils d’administration: loi n° 2014-873 du 4 août 2014 pour l’égalité réelle entre les femmes et les hommes

Nous l’avions déjà évoquée dans ce blog au mois de juin lorsqu’elle était en cours d’adoption, la loi « pour l’égalité réelle entre les femmes et les hommes » vient de paraître au JO de ce matin: http://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000029330832&dateTexte=&categorieLien=id.

Cette loi procède par son article 67 à deux modifications des règles de représentation des sexes dans les conseils d’administration et de surveillance des sociétés anonymes et des commandites par actions. Sont visées aussi les sociétés européennes immatriculées en France.

Pour rappel, la loi n° 2011-103 du 27 janvier 2011 avait introduit un système de quotas applicable dans les sociétés cotées en bourse, mais aussi dans des sociétés atteignant pendant 3 exercices deux seuils.

Seuil 1: nombre moyen de salariés permanents égal à 500

Seuil 2: montant net du chiffre d’affaires ou total de bilan égal à 50 millions d’euros.

Le principe était que les sociétés visées devaient atteindre 40% de représentants de chaque sexe dans un conseil donné, mais comme on ne peut bouleverser la gouvernance d’une entreprise du jour au lendemain, un calendrier d’entrée en vigueur était prévu. Le principe de 40% de représentants de chaque sexe dans un conseil n’entrait en vigueur que progressivement. Les sociétés cotées en bourse ont fait l’objet d’un calendrier qui leur impose déjà aujourd’hui d’avoir au moins 20% de femmes au conseil (précisément, à l’issue de la première assemblée générale qui suit le 1er janvier 2014). Ce n’est qu’au 1er janvier 2017 qu’elles devront respecter le quota de 40%.

Les sociétés non cotées bénéficiaient de beaucoup de temps pour s’adapter, puisque l’article 5 de la loi du 27 janvier 2011 indiquait que l’on prendrait en compte les seuils ci-dessus pour les trois exercices ouverts à compter du 1er janvier 2017. Ce n’était donc qu’à compter du 1er janvier 2020 que ces sociétés allaient être concernées. Cela change, puisque c’est à compter du 1er janvier 2014 que l’on se doit maintenant se placer pour prendre en compte les trois exercices, ce qui rend le quota de 40% en principe applicable dès le 1er janvier 2017 dans les sociétés non cotées dépassant les seuils ci-dessus, à l’identique des sociétés cotées, donc, et sans période de transition, ce qui n’est pas l’idéal pour ces sociétés souvent familiales. Pour être précis, deux choses peuvent ralentir un peu l’application du quota de 40% dans ces sociétés. Un exercice décalé peut retarder de quelques mois l’application du quota, et par ailleurs, celui-ci s’applique dans ces sociétés « à l’issue de la plus prochaine assemblée générale ayant à statuer sur des nominations ». Rappelons que différentes sanctions sont prévues en cas de non-respect du quota: nullité des nominations irrégulières, suspension des jetons de présence dus au conseil irrégulièrement composé, notamment.

En outre, le seuil de 500 salariés sera abaissé à 250 salariés à compter du 1er janvier 2020.

On comprend donc que ce sont des entreprises de moins en moins grandes qui sont ciblées par le législateur en quête d’égalité des sexes. Observons simplement que la loi vise uniquement les sociétés anonymes et les sociétés en commandite par actions. Il suffit qu’une société ait choisie la forme de la société par actions simplifiée (SAS) pour échapper à toute obligation de féminisation (une SAS n’a d’ailleurs pas nécessairement un conseil d’administration ou de surveillance). Si l’on voulait cibler les SAS, il faudrait imposer des quotas dans les organes collégiaux, en admettant qu’il y en ait… En conclusion, cette accélération de la féminisation des conseils d’administration pourra être facilement évitée par les sociétés anonymes restantes, qui n’auront qu’à modifier leur forme sociale, si elles ne l’ont pas déjà fait.

NB: la loi nouvelle retouche aussi (art. 66) le régime de représentation prévu par la loi du 26 juillet 1983 relative à la démocratisation du secteur public et renforce l’égalité des sexes dans la désignation des administrateurs et membres des conseils de surveillance des sociétés et entités visées par cette loi (contrôlées par l’Etat). Attention, la compréhension du champ d’application de cette loi n’est pas simple…

Bruno DONDERO

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Féminisation des conseils: l’Assemblée décide une accélération brutale… sur le papier

L’Assemblée nationale vient de procéder à deux retouches importantes du régime de la représentation des sexes au sein des conseils d’administration et de surveillance des sociétés. Reste à savoir si ces retouches seront validées par la commission mixte paritaire à venir. La loi n° 2011-103 du 27 janvier 2011 avait introduit un système de quotas applicable dans les sociétés cotées en bourse, mais aussi dans des sociétés atteignant pendant 3 exercices deux seuils.

Seuil 1: nombre moyen de salariés permanents égal à 500

Seuil 2: montant net du chiffre d’affaires ou total de bilan égal à 50 millions d’euros.

Quand on fait une loi, il est important de s’intéresser au calendrier de son entrée en vigueur. Le principe posé par la loi de 2011 est celui de 40% de représentants de chaque sexe dans un conseil, mais cette obligation n’entre en vigueur que progressivement. Les sociétés cotées en bourse ont fait l’objet d’un calendrier qui leur impose déjà aujourd’hui d’avoir au moins 20% de femmes au conseil (précisément, à l’issue de la première assemblée générale qui suit le 1er janvier 2014). Ce n’est qu’au 1er janvier 2017 qu’elles devront respecter le quota de 40%.

Les sociétés non cotées bénéficiaient de beaucoup de temps pour s’adapter, puisque l’article 5 de la loi du 27 janvier 2011 indiquait que l’on prendrait en compte les seuils ci-dessus pour les trois exercices ouverts à compter du 1er janvier 2017. Ce n’était donc qu’à compter du 1er janvier 2020 que ces sociétés allaient être concernées. Cela changerait, si la modification votée par l’Assemblée la nuit dernière devenait définitive, puisque ce serait à compter du 1er janvier 2014 que l’on se placerait pour prendre en compte les trois exercices, ce qui rendrait le seuil de 40% applicable dès le 1er janvier 2017 dans les sociétés non cotées dépassant les seuils ci-dessus, à l’identique des sociétés cotées, donc, et sans période de transition, ce qui n’est pas l’idéal pour ces sociétés souvent familiales. Dès cette date ces sociétés devraient avoir 40% de femmes dans leurs conseils d’administration ou de surveillance.

En outre, le seuil de 500 salariés serait abaissé à 250 salariés à compter du 1er janvier 2020.

On comprend donc que ce sont des entreprises de moins en moins grandes qui sont ciblées par le législateur en quête d’égalité des sexes. Observons simplement que la loi vise uniquement les sociétés anonymes et les sociétés en commandite par actions. Il suffit qu’une société ait choisie la forme de la société par actions simplifiée (SAS) pour échapper à toute obligation de féminisation (une SAS n’a d’ailleurs pas nécessairement un conseil d’administration ou de surveillance). Si l’on voulait cibler les SAS, il faudrait imposer des quotas dans les organes collégiaux, en admettant qu’il y en ait… En conclusion, cette accélération de la féminisation des conseils d’administration pourra être facilement évitée par les sociétés anonymes restantes, qui n’auront qu’à modifier leur forme sociale, si elles ne l’ont pas déjà fait.

Bruno Dondero

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