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L’acte juridique d’expert-comptable rejeté par le Conseil constitutionnel (décision n° 2014-691 du 20 mars 2014)

Le Conseil constitutionnel a rendu sa décision relative à la loi ALUR (loi pour l’accès au logement et un urbanisme rénové).

Il a déclaré conformes à la constitution la plupart des dispositions de la loi, mais il a censuré l’article 153, relatif à « l’acte juridique contresigné par expert-comptable », par ses considérants n° 74 à 76.

La décision est consultable sur le site du Conseil constitutionnel: http://www.conseil-constitutionnel.fr/conseil-constitutionnel/francais/les-decisions/acces-par-date/decisions-depuis-1959/2014/2014-691-dc/decision-n-2014-691-dc-du-20-mars-2014.140310.html .

Nous avions évoqué la saisine du Conseil constitutionnel ici: https://brunodondero.wordpress.com/2014/02/25/acte-juridique-contresigne-par-expert-comptable-la-loi-alur-devant-le-conseil-constitutionnel/ et nous avions commenté l’art. 153 là: https://brunodondero.wordpress.com/2014/02/20/quand-le-legislateur-invente-lacte-juridique-contresigne-par-expert-comptable-loi-alur-et-cession-de-parts-de-sci/

 

Cet article 153 disparaît donc, ce qui est une bonne chose mais n’épargnera pas une discussion sur le périmètre du droit et l’exercice du droit (nous soulignons le passage pertinent):

« 74. Considérant que l’article 153 complète l’article 1861 du code civil pour imposer que la cession de la majorité des parts sociales d’une société civile immobilière remplissant certaines conditions soit constatée par un acte reçu en la forme authentique ou par un acte sous seing privé contresigné par un avocat ou par un professionnel de l’expertise comptable ; 

75. Considérant que, selon les sénateurs requérants, ces dispositions, en confondant l’acte sous seing privé contresigné par un avocat et celui contresigné par un professionnel de l’expertise comptable, méconnaissent l’objectif de valeur constitutionnelle d’accessibilité et d’intelligibilité de la loi et portent atteinte à la sécurité juridique ; qu’en renvoyant aux conditions prévues au chapitre Ier bis du titre II de la loi du 31 décembre 1971, applicable aux avocats, pour définir l’acte sous seing privé contresigné par un professionnel de l’expertise comptable, le législateur aurait également méconnu l’étendue de sa compétence ; 

76. Considérant que l’article 153 a été introduit par amendement en première lecture à l’Assemblée nationale ; qu’il modifie des dispositions relatives aux actes qui doivent être accomplis par des officiers publics ou des membres des professions réglementées ; que ces dispositions ne présentent pas de lien avec les dispositions du projet de loi initial ; qu’elles ont donc été adoptées selon une procédure contraire à la Constitution ; que, sans qu’il soit besoin d’examiner les griefs soulevés par les sénateurs requérants, l’article 153 doit être déclaré contraire à la Constitution « .

Bruno DONDERO

 

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Acte juridique contresigné par expert-comptable: la loi ALUR devant le Conseil constitutionnel

Des sénateurs UMP viennent de former un recours devant le Conseil constitutionnel relatif à la loi ALUR (http://www.ump-senat.fr/spip.php?article7721).

 

Le recours porte sur quatre aspects de la loi :

–          l’encadrement des loyers, que les auteurs du recours estiment contraire au droit de propriété ;

–          les dispositions relatives au mécanisme d’autorisation relatif à la location de meublés, auquel différents reproches sont faits ;

–          les dispositions relatives aux agences de listes, auxquelles une atteinte excessive à la liberté d’entreprendre est reprochée ;

–          le régime de la cession de parts de SCI, sur lequel nous revenons ici.

 

Nous avons pu précédemment relever les critiques que suscite la mesure résultant de l’art. 70 quater de la loi ALUR (https://brunodondero.wordpress.com/2014/02/20/quand-le-legislateur-invente-lacte-juridique-contresigne-par-expert-comptable-loi-alur-et-cession-de-parts-de-sci/).

 

La mesure consiste, rappelons-le, à imposer pour la cession de la majorité des parts d’une SCI propriétaire d’un bien soumis au droit de préemption urbain « un acte reçu en la forme authentique ou (…) un acte sous seing privé contresigné par un avocat ou par un professionnel de l’expertise comptable dans les conditions prévues au chapitre Ier bis du titre II de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques ». Or si l’on sait ce qu’est un acte authentique ou un acte contresigné par avocat, l’acte contresigné par un professionnel de l’expertise comptable « dans les conditions prévues au chapitre Ier bis du titre II de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques » est absolument inconnu, sans doute parce que la profession d’expert-comptable ne relève pas des professions judiciaires et juridiques ! En clair, la loi de 1971 ne régit que l’acte contresigné par avocat, auquel les experts-comptables s’étaient d’ailleurs opposés.

 

Les auteurs du recours adressent deux reproches à cette mesure de la loi ALUR.

 

Tout d’abord, il est reproché à la loi de contrevenir au principe d’intelligibilité de la loi et à la sécurité juridique. Les requérants estiment que les avocats semblent plus particulièrement en mesure de participer au renforcement de la sécurité juridique que doit permettre de réaliser l’acte contresigné, et qu’en consacrant un acte juridique contresigné par une autre profession, qui n’exerce pas à titre principal l’activité de conseil juridique, le législateur a remis en cause la place même du droit et a nié les spécificités des professions réglementées.

 

Les auteurs du recours invoquent par ailleurs le principe d’incompétence négative développé par la jurisprudence du Conseil constitutionnel, qui doit conduire à invalider l’acte juridique ouvert aux professionnels de l’expertise comptable institué par la loi ALUR. Par ces termes, il est reproché au législateur de ne pas avoir exercé pleinement sa compétence en se référant à un acte juridique contresigné par expert-comptable sur lequel il n’a pas autrement légiféré (v. sur l’incompétence négative http://www.senat.fr/ej/ej03/ej030.html).

 Bruno DONDERO

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