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Nouvelle classification des arrêts de la Cour de cassation: au revoir P, B, R, I, bonjour B, R, L, C!

Les juristes étaient habitués à lire les lettres P, B, R, I sur les arrêts les plus importants de la Cour de cassation. Cette classification des arrêts va évoluer.

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Voilà le signe d’un arrêt important! (Lettre Lumineuse B – Blanc – SKYLANTERN®) ORIGINAL

Les premiers présidents des cours d’appel ont en effet été destinataires d’une lettre de la première présidente de la Cour de cassation en date du 21 avril 2021, qui détaille l’évolution du « siglage » des arrêts de la Cour de cassation. Il est indiqué que cette évolution entrera en vigueur « pour les arrêts dont la date de délibéré est postérieure au 15 juin 2021 », mais une anticipation est possible (v. infra).

Ce que l’on appelle le siglage des arrêts de la Cour de cassation désigne des lettres qui accompagnent les arrêts et qui leur donnent une plus ou moins grande autorité, en fonction de la diffusion qui a été décidée. En clair, la Cour de cassation rend des milliers d’arrêts chaque année (près de 22.000 dossiers ont été jugés ou radiés en 2020), et le choix de les publier au Bulletin des arrêts, de les mentionner au Rapport annuel ou de les mettre en ligne sur le site de la Cour, sont des indicateurs importants de la valeur que les juges entendent donner à leur décision.

Tout lecteur des arrêts de la Cour de cassation y trouve une utilité.

L’étudiant qui commente un arrêt de la Cour de cassation doit, s’il dispose d’informations sur la diffusion de la décision, en tenir compte. Si une décision est très audacieuse, par exemple parce qu’elle prend une liberté par rapport au texte qu’elle applique, sa publication au Bulletin marquera la volonté de la Cour de faire connaître la solution retenue et, peut-on supposer, sa volonté de voir celle-ci s’établir. Non publiée, la même décision sera davantage un « ballon d’essai » et l’on pourra douter de la volonté des magistrats de voir celle-ci donner naissance à une jurisprudence établie.

L’avocat, juriste d’entreprise ou professionnel du droit qui se sert des arrêts de la Cour de cassation pour conseiller une partie ou pour l’assister dans un contentieux devra lui aussi avoir égard au degré de diffusion des décisions qu’il utilise. Dans un contentieux, par exemple, il est utile de regarder si les décisions invoquées par la partie adverse sont publiées au Bulletin ou non. Ce n’est pas la même chose de se fonder sur une jurisprudence bien établie et publiée, et sur une ou plusieurs décisions inédites de la Cour de cassation. Si les arrêts que l’on invoque dans ses propres écritures ont une large diffusion, il est important de le souligner.

Précisons que tout ceci vaut dans un système où les arrêts de la Cour de cassation constituent les briques innombrables d’un édifice qu’il faut reconstruire à chaque fois. Nous avons suggéré l’an passé de recourir à une organisation différente, celle de la synthèse de l’acquis jurisprudentiel (Pour un droit plus systématique: vers la fin des notes de jurisprudence?, D. 2020, p. 292).

I – Le siglage utilisé jusqu’à présent.

Jusqu’à maintenant, les arrêts de la Cour de cassation pouvaient faire l’objet d’un siglage en quatre lettres :

P : publication de l’arrêt au Bulletin des arrêts, qui est un recueil non commenté des arrêts de la Cour de cassation, accessible sur son site. Ce sont en réalité deux Bulletins qui existent : l’un pour les arrêts des chambres dites « civiles », et incluant non seulement les trois chambres civiles, mais aussi la chambre commerciale et la chambre sociale ; l’autre pour les arrêts de la chambre criminelle. Actuellement, cette publication accuse trois ans de retard pour le Bulletin des arrêts des chambres civiles et deux pour le Bulletin des arrêts de la chambre criminelle.

B : publication de l’arrêt au Bulletin d’information de la Cour de cassation (BICC), publication qui a disparu en 2020… ce qui n’empêchait pas certaines formations de continuer à utiliser cette lettre, même après cette suppression.

R : mention de l’arrêt et analyse au Rapport annuel de la Cour de cassation.

I : publication immédiate de l’arrêt sur le site de la Cour de cassation.

La publication au Bulletin était (et demeurera sans doute) le premier critère permettant de différencier les arrêts vus comme importants par la Cour de cassation elle-même, d’une part, et les autres décisions rendues par cette juridiction, d’autre part. Les arrêts les plus importants étaient « P+B+R+I », et, en-dessous, beaucoup d’arrêts étaient P+B+I ou, plus récemment, P+I.

La proportion des arrêts publiés au Bulletin. Prenons 2017, qui est l’année la plus récente où l’on peut comparer le nombre de décisions rendues par la Cour de cassation et le nombre d’arrêts publiés au Bulletin, puisque le Bulletin des arrêts des chambres civiles de 2018 n’est pas encore intégralement publié. 20.268 dossiers ont été traités hors radiation, ce qui correspond à 14.875 décisions donnant lieu à cassation, rejet, irrecevabilité, etc., le reste ayant donné lieu à déchéance ou désistement. Les différentes chambres ont vu leurs arrêts publiés au Bulletin comme suit : 254 pour la première chambre civile, 239 pour la deuxième, 148 pour la troisième, 167 pour la chambre commerciale, 228 pour la chambre sociale et 299 pour la chambre criminelle. Ce total de 1.335 arrêts publiés (auxquels il faut ajouter les arrêts rendus en chambre mixte ou en assemblée plénière) signifie que moins de 10% des décisions hors déchéance, désistement ou radiation ont l’honneur d’une publication au Bulletin.

La valeur du critère de la publication immédiate sur le site internet reste quant à elle un peu mystérieuse, au regard de la diversité d’utilisation qu’en font les différentes chambres de la Cour de cassation. En 2020, la chambre commerciale a mis en ligne 3 arrêts seulement, là où la troisième chambre civile a choisi d’en mettre en ligne pas moins de… 93 !

Les arrêts non publiés au Bulletin sont et resteront sans doute affectés d’une lettre « D », faut-il signaler enfin.

II – L’évolution opérée.

Désormais, les lettres utilisées seront B, R, L et C.

B : publication au Bulletin des arrêts de la Cour de cassation, cette lettre remplaçant la lettre P utilisée précédemment, et ne correspondant plus au BICC, qui a disparu comme cela a été dit.

Les arrêts « B » seront diffusés sur le site de la Cour de cassation, le jour même de leur mise à disposition. On perdra le signal d’attention qu’opérait précédemment la lettre « I », mais on a compris que ce signal n’était finalement pas très lisible, du fait des pratiques non harmonisées des différentes chambres (v. supra).

R : comme précédemment, mention et analyse au Rapport annuel de la Cour de cassation.

Il est indiqué que seules ces deux lettres « B » et « R » apparaîtront le cas échéant sur la minute des arrêts.

Sont par ailleurs ajoutées deux nouvelles lettres.

L : arrêts sélectionnés pour être commentés dans les Lettres des chambres. Seront concernés tant des « arrêts déterminants au plan du droit que des décisions de moindre portée juridique mais qui illustrent que la juridiction contribue à structurer le monde qui nous entoure en lien avec l’activité sociétale et la vie quotidienne des citoyens ».

C : arrêts donnant lieu à « une communication immédiate à destination du grand public, livrant de façon synthétique et accessible le sens de la décision ». Il est indiqué que « sont concernés les arrêts qui sont susceptibles d’avoir une forte incidence sur la vie quotidienne des citoyens, un fort impact social ou économique, ou encore, qui font écho à l’actualité ou à un sujet émergent, que ces arrêts présentent ou non un intérêt juridique ».

On aura compris que les lettres « L » et « C » pourront s’appliquer à des arrêts B+R, mais aussi à de « simples arrêts B » et également, est-il expressément précisé, à des arrêts non publiés au Bulletin.

On peut supposer que les arrêts non publiés conserveront leur lettre « D ».

III – Entrée en vigueur – observation complémentaire.

Il est indiqué par la lettre que le nouveau siglage entrera en vigueur « pour les arrêts dont la date de délibéré est postérieure au 15 juin 2021 ».

On comprend aussi, cependant, que cette évolution pourra être anticipée, puisqu’il est indiqué que « d’ici le 15 juin 2021, les arrêts publiés de la Cour de cassation pourront être classés « P » ou « P »/« R », outre l’usage des siglages de communication « L » et « C » ».

La mise en ligne immédiate des arrêts publiés au Bulletin interviendra quant à elle dès le 3 mai 2021.

Observation complémentaire : le site de la Cour de cassation indique que les formations des chambres diffèrent « selon la complexité des pourvois », ce qui donne lieu à trois situations, également désignées par des lettres :

« FP » : formation plénière de chambre ;

« FS » : formation de section (9 à 15 magistrats selon les chambres) ;

« F » ou « FR » : formation restreinte (le président, le doyen et le conseiller rapporteur).

Bruno DONDERO

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Patates sunt servanda!

En cette période de confinement, il faut essayer de s’occuper et de rire. Mais peut-on vraiment rire avec les blagues de juriste?

 

Les blagues de juriste? Vous êtes sérieux, là?

Nous avons déjà évoqué sur ce blog les « blagues de juriste », ces blagues qui ne font rire que les juristes. Ce ne sont pas les « lawyers jokes », les blagues sur les avocats, qui elles font rire tout le monde sauf les juristes et qui, surtout, s’importent mal: elles utilisent surtout les traits que l’on prête aux avocats américains, comme celui d’aimer beaucoup l’argent, alors que l’avocat français exerce ses fonctions, notamment, en respectant le principe de « désintéressement ».

Les blagues de juriste font rire avec le droit, ce qui peut sembler un pari audacieux.

Exemple de blague: 

Pourquoi le publiciste est-il resté en bas de l’immeuble toute la soirée ?

Parce qu’il n’avait pas le code!

Celui qui n’a pas fait de droit public, et ne sait pas que le droit public n’a pas de code fondateur comme le Code civil ou le Code de commerce, ne saisit pas le double sens du mot « code ».

Du coup, si je décide de raconter cette blague en soirée à un public de non-juristes, plusieurs possibilités, une fois que j’ai demandé le silence et que tout le monde m’écoute:

  • Commencer la blague sans explication préalable, et ne faire rire personne;
  • Commencer la blague après avoir expliqué la différence entre le droit privé et le droit public, la manière dont le droit public s’est construit par rapport au droit privé, une brève évocation de l’arrêt Blanco. Si on me laisse terminer mon explication, et que j’arrive à raconter ma blague, j’aurais barbé tout le monde, en plus de ne faire rire personne.

Mais si par chance, ou par obligation, je fréquente une soirée où la majorité du public est composé de juristes, il se trouvera sans doute une bonne âme pour commencer à rire.

 

« Pacta sunt servanda »

En latin, cela veut dire que les contrats doivent être exécutés. Cela veut dire qu’il faut respecter sa parole, et que lorsque l’on conclut un contrat, il faut le respecter et exécuter les obligations que l’on a souscrites. Si je conclus un contrat de vente comme vendeur, je dois remettre le bien à l’acheteur; si je signe comme acheteur, je dois payer le prix au vendeur.

Ce principe était exprimé, entre 1804 et 2016, par l’article 1134 du Code civil, et après la réforme du droit des contrats de 2016, on le retrouve à l’article 1103 du Code civil:

Article 1103 du Code civil: Les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits.

C’est un principe fondamental de la vie en Société, et en dehors des relations entre les personnes privées, ce principe vaut dans toutes les relations, même celles qui impliquent la puissance publique. Les contrats conclus par l’Etat sont aussi des contrats, même s’ils obéissent à des règles particulières. Beaucoup de statuts légaux (le mariage par exemple) reposent aussi sur l’idée que l’on consent à s’engager.

Mais pourquoi « Patates sunt servanda », alors?

 

« Patates sunt servanda »?

Cela signifie-t-il qu’il est temps de servir les patates?

Est-ce la traduction latine du désormais célèbre hymne de la famille Tuche (« Des frites! Des frites! Des frites, des frites, des frites!! »)?

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Cela renvoie-t-il à ce merveilleux épisode de la série  The Twilight Zone / La quatrième dimension, qui s’appelle «  To serve man »/ »Servir l’homme » ?

Si vous ne l’avez jamais vu, faites-le, la chute est incroyable, et n’allez surtout pas lire la page Wikipédia consacrée à cette épisode, qui comme bien souvent avec l’encyclopédie collaborative, vous révèle sans complexe la chute et vous prive de tout le suspense!

 

 

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En tous les cas, quand le confinement sera fini et que les cours auront repris à l’Université, ne perdez pas une occasion de faire rire les autres étudiants en leur faisant croire que l’adage a un lien avec la famille Tuche!

On se retrouve demain lundi à 17h pour le Facebook Live de notre cours de droit des sociétés! D’ici là, prenez soin de vous et de vos proches et protégez-vous bien!

Bruno DONDERO

 

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CAPA ou pas CAPA?, DG de Renault SA et programme de la semaine

Chers étudiants et amis juristes,

En attendant d’avoir le plaisir de vous retrouver demain en cours, à la fois en amphi et sur FacebookLive, je voudrais revenir sur un sujet qui n’est pas anodin, parce qu’il concerne beaucoup d’étudiants en droit.

La semaine passée, j’ai eu le plaisir d’animer une table ronde sur l’avocat en entreprise.

M. le député Raphaël GAUVAIN, qui participait, a rédigé un rapport sur la compétitivité des entreprises françaises, et l’une des mesures qu’il prône pour favoriser cette compétitivité passe par l’octroi de la confidentialité aux avis juridiques donnés par la direction juridique de nos entreprises.

En effet, en l’état du droit français, il est possible de saisir les correspondances – mails notamment – adressées dans le cadre de l’entreprise, et de s’en servir contre elle. Une autorité américaine qui reprocherait à une de nos entreprises des faits de concurrence déloyale pouvant produire un effet sur le territoire américain, par exemple, pourrait utiliser les échanges intervenus entre les cadres de l’entreprise française pour établir la preuve que cette entreprise avait conscience de l’illicéité des faits qui lui sont reprochés.

Un moyen envisagé consisterait donc à donner aux juristes de l’entreprise, qui sont des salariés, le même statut que celui dont bénéficie l’avocat lorsqu’il correspond avec un client.

Cette mesure est en discussion depuis des années, et elle rencontre une opposition de la part d’une partie des avocats, avec des arguments plus ou moins fondés. Une partie des avocats craint notamment une concurrence de la part de ces nouveaux avocats…

J’ai filmé l’intégralité de la manifestation et l’ai retransmis en direct sur Facebook, et elle est toujours consultable ici.

 

T’es CAPA ?

Surtout, au cours des discussions, a été évoqué un fait assez étonnant, qui verrait beaucoup de directions juridiques demander aux candidats d’être détenteurs du CAPA – certificat d’aptitude à la profession d’avocat.

Après quelques échanges sur Twitter, j’ai été regarder un certain nombre d’annonces pour des postes de juristes d’entreprise, qui demandent souvent, c’est vrai, la détention du CAPA.

Pour faire le lien avec le sujet de la confidentialité, ce n’est pas aujourd’hui pour bénéficier de cette confidentialité que le CAPA est demandé, puisque le juriste d’entreprise dont on parle ne sera pas un avocat mais bien un juriste d’entreprise salarié. Peut-être que si la loi française change, les avis des juristes d’entreprise seront confidentiels, et peut-être que cet avantage sera réservé aux juristes d’entreprise titulaires du CAPA. Mais ce n’est pas le cas aujourd’hui.

Dans les échanges d’hier, l’AFJE, l’Association Française des Juristes d’Entreprise, a fait savoir qu’une étude sortirait bientôt, faite en collaboration avec le Cercle Montesquieu, qui réunit de nombreux directeurs juridiques, dont il ressort que le quart des juristes d’entreprise est titulaire du CAPA.

Je m’intéresse à la question parce que le CAPA n’est pas juste une étiquette qu’on a ou pas.

Le CAPA est tout d’abord une formation longue (18 mois), destinée à l’exercice d’une profession particulière, celle d’avocat. Il est important que l’étudiant qui s’engage dans un tel parcours soit certain de son utilité. Je peux tout à fait comprendre qu’on suive cette formation sans être sûr de vouloir exercer par la suite, mais je trouve cela plus étonnant qu’on se lance dans ce parcours avec la certitude que l’on ne sera jamais avocat.

C’est ensuite une formation dont l’organisation est nécessairement lourde pour les barreaux qui doivent mettre en place les écoles de formation. Il est important que ces écoles servent à former les avocats avant tout. Si les écoles d’avocats visent à former à d’autres métiers du droit, cela montre sans doute leur qualité, mais il faudrait alors repenser leur organisation et leur financement.

Du point de vue des directions juridiques, enfin, je me demande si c’est une formation qui est réellement utile. Que l’on exige une expérience de plusieurs années en cabinet d’avocats est une chose, mais pourquoi exiger le diplôme qui permettrait de devenir avocat… sans l’expérience qui va avec ? Celui qui est titulaire du CAPA a reçu une formation et a effectué des stages, soit. Mais ce temps n’aurait-il pas été mieux employé à suivre une formation différente, en France ou à l’étranger, à acquérir une expérience internationale, d’autant que les étudiants dont on parle ont généralement tous un master 2 de droit, c’est-à-dire un parcours de 5 années de droit. Est-il utile d’avoir fait 6,5 années d’études très juridiques et généralement très françaises pour intégrer une direction juridique ?

Bref, débat qui n’est pas terminé. Mais je voudrais savoir si ceux qui rédigent les fiches de poste, dans les entreprises, ont réellement en tête l’exigence du CAPA, ou s’ils ne méconnaissent pas les métiers du droit, et pensent que tout bon juriste doit avoir son diplôme d’avocat (ce serait la faute de la série Suits !).

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Daredevil deviendra-t-il juriste d’entreprise?

 

 

Programme de la semaine.

Nous allons reparler de la société Renault.

L’an passé, nous avions suivi le remplacement de Carlos Ghosn, qui était président-directeur général, par un président du conseil d’administration et un directeur général.

C’est maintenant le directeur général nommé en janvier dernier qui a vu ses fonctions prendre fin. Vous trouverez ici le communiqué de presse du conseil d’administration de Renault SA que nous détaillerons ensemble demain lundi.

Mardi, nous accueillerons dans notre amphi Jacques Lévy Véhel, fondateur et président de la société Case Law Analytics, toujours pour que vous puissiez mieux connaître le monde de la LegalTech, c’est-à-dire ces entreprises qui appliquent aux activités juridiques des technologies: algorithmes, blockchain, évaluation en ligne, etc.

A demain!

Bruno Dondero

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Avocats: pas de bureau secondaire en entreprise (CE, 29 janv. 2018, n° 403101)

Le Conseil d’Etat a rendu hier une décision qui fera certainement l’objet de nombreux commentaires, et qui est relative à l’exercice de la profession d’avocat. La décision est disponible ici.

Le Conseil d’Etat annule une décision du Conseil national des barreaux (CNB),  qui modifiait le Règlement intérieur national de la profession d’avocat (art. 15.2.2) en permettant à un avocat d’ouvrir un bureau secondaire dans les locaux d’une entreprise, qui pouvait être cliente de l’avocat, mais ne devait pas « exercer une activité s’inscrivant dans le cadre d’une interprofessionnalité avec un avocat« .

Il est jugé par le Conseil d’Etat que les règles introduites par le CNB « permettent l’exercice de la profession dans des conditions qui ne correspondent pas à des règles et usages des barreaux et doivent ainsi être regardées comme instituant des règles nouvelles« . Or ces règles nouvelles n’auraient pas de fondement dans les règles législatives ou réglementaires régissant l’exercice de la profession d’avocat et ne peuvent être regardées comme une conséquence nécessaire d’une règle figurant au nombre des traditions de la profession.

De plus, il est jugé que les conditions d’exercice ainsi créées sont susceptibles de placer les avocats concernés dans une situation de dépendance matérielle et fonctionnelle vis-à-vis de l’entreprise qui les héberge et mettent ainsi en cause les règles essentielles d’indépendance de l’avocat et de respect du secret professionnel. Elles ne sont par conséquent, selon la décision, pas au nombre de celles que le CNB était compétent pour édicter.

Deux observations rapides.

  1. Tout d’abord, si la profession d’avocat voit ses règles évoluer, cela ne va pas aussi vite que le CNB le souhaiterait. A une époque lointaine, les avocats se demandaient si leur déontologie ne s’opposait pas à des visites chez leurs clients. Le CNB leur avait permis carrément de loger chez leurs clients. C’est trop, dit le Conseil d’Etat! Il n’empêche que la profession d’avocat, concurrencée aujourd’hui de tous côtés, a intérêt à gagner en souplesse; si le bureau secondaire en entreprise n’est pas admis, il faut réfléchir aux moyens de rapprocher matériellement l’avocat de ses clients dans le respect de l’indépendance et du secret professionnel. Un décret ne pourrait-il pas autoriser l’ouverture d’un bureau secondaire en entreprise en soumettant cette modalité d’organisation au respect de conditions permettant de préserver l’indépendance et le secret ?
  2. Ensuite, la décision du Conseil d’Etat va à l’encontre du rapprochement des cabinets d’avocats et des entreprises. Depuis plusieurs années, un courant de directeurs juridiques, juristes d’entreprise, avocats et universitaires encourage la création d’un statut de l’avocat en entreprise, qui donnerait au juriste d’entreprise le bénéfice de la confidentialité de ses avis juridiques. Permettre qu’un bureau secondaire d’avocat soit logé dans les locaux d’une entreprise se rapprochait de cette idée.

Bruno DONDERO

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Apprendre le droit avec Marine Le Pen: l’objet et la cause du contrat

 

L’examen en première lecture par l’Assemblée nationale du projet de loi de ratification de l’ordonnance du 10 février 2016 réformant le droit des contrats, de la preuve et le régime général des obligations a été l’occasion, lundi 11 décembre, de beaux échanges sur le droit des contrats.

Il a été question, comme on l’a évoqué hier sur ce blog, entre autres, du professeur Denis Mazeaud, de l’objet du contrat, de la simplification du droit, du doyen Carbonnier, de la cause, de la complexification du droit, des étudiants en droit, etc.

MLP

On a vu la France Insoumise prendre la défense de la théorie de la cause, pourquoi pas, mais on a aussi vu intervenir une députée qui devrait être particulièrement compétente pour parler du droit des contrats, puisqu’elle est avocate: Marine Le Pen.

Madame Le Pen est descendue dans l’arène pour dire qu’elle n’aimait pas le flou dans le droit, et pour défendre un amendement visant « à préciser que le contenu du contrat doit comporter un objet certain, c’est-à-dire l’existence réciproque d’une contrepartie à l’obligation de l’autre partie« . Elle ajoute: « En l’absence d’une contrepartie réelle, le contrat n’a plus d’objet« .

Ce faisant, notre juriste confond en réalité deux notions fondamentales du droit des contrats, à savoir l’objet (ce sur quoi portent les obligations des parties ou le contrat dans son ensemble) et la cause (ici la cause de l’obligation: l’obligation d’une partie constitue la contrepartie de l’obligation de l’autre partie – par exemple dans la vente, l’obligation du vendeur de transférer la propriété du bien vendu a pour contrepartie l’obligation de l’acheteur de payer le prix).

Lorsqu’on lit d’ailleurs « l’exposé sommaire » de l’amendement n° 11 que Marine Le Pen défend, on y retrouve mot pour mot la même confusion entre l’objet et la cause.

Ce sont là des notions fondamentales du droit des contrats, que l’on demandait jusqu’à présent aux étudiants en droit de maîtriser lors de l’étude du droit des contrats, en deuxième année. L’ordonnance du 10 février 2016 a fait disparaître ces notions pour les remplacer par le « contenu du contrat ». La notion a été critiquée, et l’avenir nous dira comment elle est interprétée.

Il reste que, de manière paradoxale, Marine Le Pen tente de barrer la route à un texte qui supprime du droit français des notions que manifestement elle ne maîtrise pas!

Bruno DONDERO

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OpenFlow, ou le marché des actes juridiques d’occasion (LegalTech)

Open Flow 2

Il est beau mon acte juridique, il n’a pas beaucoup servi…

Le phénomène de la LegalTech est en pleine expansion.

Par LegalTech, on désigne le secteur des entreprises qui investissent le monde du droit en proposant de nouveaux services faisant recours au numérique. Cela peut aller de services d’analyse des documents juridiques de l’entreprise aux algorithmes de la justice prédictive, en passant par des services plus simples, comme ceux de DemanderJustice.com.

Le recours au numérique se limite finalement pour certaines Legaltechs à rendre leur service accessible par internet, ce qui crée un marché finalement. Si DemanderJustice.com devait envoyer par courrier postal les mises en demeure et assignations qu’il vend à ses utilisateurs, après que ceux-ci lui aient adressé par cette même voie les informations requises pour rédiger les documents achetés, on imagine que le service du site serait considérablement ralenti. Tout est facile si on peut en quelques clics donner les informations, choisir le document qui convient, le payer et le récupérer…

Ce monde des start-ups juridiques – on peut aussi appeler comme cela ces entreprises – est en pleine expansion en ce que des entreprises de plus en plus nombreuses voient le jour, tournées vers les professionnels du droit ou vers les justiciables, selon les cas, proposant des services très divers, au point qu’on finit par s’y perdre. C’est par dizaines en France que ces sociétés voient le jour, et l’on saura gré à ceux qui ont entrepris de dresser un annuaire de ces nouveaux acteurs du droit.

 

De nouveaux acteurs du droit.

Oui, même si la tâche d’identification de l’activité des LegalTechs est rendue plus compliquée par la diversité des services proposés et par les noms exotiques adoptés, il faut les reconnaître pour ce qu’elles sont : des acteurs du droit.

Il n’est pas dit que ces entreprises soient nécessairement soumises à des règles encadrant leur activité liée au droit. Une entreprise donnant des informations générales sur tel ou tel secteur du droit n’exerce pas une activité encadrée, mais elle rentre dans une activité réglementée si elle se livre à du conseil juridique. Problème : la frontière est assez floue. Si je mets en ligne des statuts de société, et que vous pouvez les télécharger pour quelques dizaines d’euros, ne suis-je pas en train de me livrer à de la rédaction d’actes et à du conseil juridique ? Or, il s’agit là d’activités qui, lorsqu’elles sont rémunérées et exercées de manière habituelle, sont réservées à des professionnels appartenant à des catégories bien définies.

C’est un défi à la fois pour notre économie et pour notre droit que de définir les conditions permettant dans le même temps d’accueillir ces nouvelles entreprises tout en contrôlant que ne soit pas fait n’importe quoi, avec des actes rédigés n’importe comment et vendus en ligne comme ayant été rédigés par des professionnels du droit alors que ce ne sera pas le cas.

Souvent, ces nouvelles entreprises obligent à se poser des questions que l’on ne s’était jamais posé avant, et c’est par exemple le cas pour l’entreprise dont nous allons parler maintenant : OpenFlow.

Un exemple : OpenFlow

Les créateurs de cette entreprise auraient pu faire un jeu de mots avec Open Flow (« flux ouvert ») et « Law » (droit) et l’appeler « Open Flaw », mais cela aurait signifié « Faute ouverte », plus ou moins, donc on comprend que l’on n’ait pas poussé le jeu de mots…

Le site est une plate-forme de vente d’actes juridiques, qui met en contact des vendeurs et des acheteurs, ces derniers étant selon les conditions générales du site des professionnels.

En clair, des professionnels du droit (les vendeurs) mettent en ligne des actes juridiques qu’ils ont faits, sans doute pour leurs clients, mais on peut supposer qu’un acte « original » serait recevable aussi.

Des acheteurs professionnels peuvent les télécharger en payant une somme variable.

Par exemple, il vous en coûtera :

  • 10 euros pour un accord de confidentialité, acte assez simple et classique ;
  • 150 euros pour un pacte d’actionnaires ;
  • 300 euros pour ce qui a l’air d’être une consultation sur les conditions pour qu’une plateforme de transfert de monnaie reste en dehors du monopole bancaire et respecte la réglementation applicable à l’émission de monnaie électronique.

La plate-forme se fait rémunérer par une commission, qui est de 30% du montant du prix de vente (mais il est indiqué dans les conditions générales que ce montant peut être amené à changer).

 

Les questions posées.

Il y a quelques années, j’avais rédigé une consultation juridique pour un particulier A, à la demande de l’avocat de celui-ci. B, le voisin de A, étant dans la même situation juridique que lui, il apprit que A avait « acheté » une consultation juridique à un professeur. B souhaitait donc obtenir la même consultations que son voisin A, avec les adaptations à sa situation. A proposa alors à B de lui vendre la consultation juridique qu’il avait demandée, en lui faisant payer la moitié du prix.

J’ai souvenir que c’est l’avocat de A qui lui dit qu’il ne pouvait pas faire cela, mais finalement, est-ce si vrai que cela ? Bien entendu, il n’est pas question que le particulier ou l’entreprise « revende » l’acte en l’ayant en partie réécrit, sauf à réaliser une mission de conseil juridique, ce qui suppose un statut particulier.

Mais sans garantie sur la valeur juridique, ne peut-on donner accès à l’information juridique que constitue l’acte en question, et ne peut-on se faire rémunérer pour cela? La question est comme souvent à la fois fondamentale (la prestation de conseil juridique ne peut-elle intervenir qu’une fois) et redoutable (qui détient la propriété de la consultation juridique?).

J’ai souvenir de consultations émanant de cabinets d’avocats américains ou le début de la consultation était consacré à indiquer que l’auteur étant le cabinet, la consultation était la propriété de celui-ci. Cette indication devrait-elle être rappelée dans les consultations rédigées par les cabinets français ?

Se pose aussi la question de la relation entre le client et le professionnel du droit. Celui-ci doit-il préciser à son client qu’il est susceptible de revendre l’acte ou la consultation juridique qu’il a fait(e) pour ce client, après avoir anonymisé cet acte ou cette consultation ? Cela incitera les clients à demander un acte ou une consultation avec exclusivité: « vous ne ferez à personne d’autre, cher Maître, un acte aussi bien rédigé que celui que vous m’avez fait ». Une sorte de clause « pari passu » de la rédaction d’acte, en somme…

Et que se passera-t-il lorsque le professionnel n’aura pas correctement anonymisé l’acte, en laissant passer une référence à l’un de ses clients ? Ou tout simplement lorsque l’acte comportera une erreur, ou ne sera plus à jour ?

Dans cette dernière hypothèse, on comprend que la plate-forme ne s’estime pas responsable, puisque ses conditions générales de vente indiquent que la vente est conclue directement entre le vendeur et l’acheteur (ce qui n’empêche pas la plate-forme d’avoir un « service après-vente »!) et que le vendeur est seul responsable des défauts constatés sur le produit… ce qui incite tout de même à se demander si c’est bien de « vente » qu’il est question, ou s’il n’y a pas une prestation plus complexe de la part du « vendeur ».

Autre question: les actes ne devraient-ils pas être accompagnés, comme les médicaments, d’une notice d’utilisation ?

Bruno DONDERO

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La justice prédictive

On parle de plus en plus de « justice prédictive », ce qui désigne non la justice elle-même (« M. le Juge, que pouvez-vous me dire de mon avenir judiciaire ? », « Eh bien, je vois une longue période passée au même endroit, et une dépense importante », « Ah… ») mais des instruments d’analyse de la jurisprudence et des écritures des parties, instruments qui permettraient de prédire les décisions à venir dans des litiges similaires à ceux analysés, c’est-à-dire d’identifier quelle solution sera donnée à un litige X par un juge Y, soit au vu des données du litige X, soit par une analyse des écritures des parties (ce n’est pas de graphologie qu’il est question mais d’analyse textuelle, comme on le verra un peu plus loin !).

En France, les entreprises qui proposent ce type d’instruments sont les sociétés Case Law Analytics et Predictice. Aux Etats-Unis, un acteur de ce secteur est la société Lex Machina.

 On peut se dire que prédire les décisions de justice est depuis toujours l’objectif de tout avocat et de tout universitaire consultant. Qui se tourne vers l’un ou l’autre de ces acteurs attend d’eux, avec plus ou moins d’espoir, une prescience de la jurisprudence. A un niveau plus personnel, le « profilage » des juges est fait depuis toujours par les avocats. La pratique américaine de la sélection des membres des jurys, popularisée par le cinéma et la littérature, rejoint les tentatives de forum shopping des avocats de par le monde. Mais la justice prédictive ne repose pas tant sur le « nez » d’un praticien du droit que sur des instruments d’analyse différents, statistiques ou d’exploration du texte.

J’ai rédigé un article sur le sujet destiné à paraître au Recueil Dalloz dans les semaines à venir, mais il est intéressant de présenter déjà ce dont on parle.

 

L’utilisation la plus évidente pour les juristes : l’analyse statistique en fonction du contenu des décisions.

Pour faire de la justice prédictive, il faut avoir créé et alimenté une base de données jurisprudentielles (on l’appellera la BDJ).

La première utilisation possible de la BDJ, et la plus évidente pour les juristes, habitués à lire et analyser les décisions de justice, consiste à procéder à une analyse statistique des décisions qu’elle contient. Par exemple, si l’on introduit dans la BDJ toutes les décisions rendues en France en matière de contestation de son licenciement par un salarié, on aura le moyen de dire dans quelle proportion l’action a été accueillie ou rejetée, combien de dommages-intérêts ont pu être accordés en moyenne, quels ont été les indemnisations les plus élevées, et ainsi de suite.

La régularité observée pour tel ou tel résultat doit aussi mettre les utilisateurs de la BDJ en mesure de connaître les chances de succès de tel ou tel argument devant les tribunaux en général, ou pourquoi pas devant tel ou tel juge. La loi des grands nombres trouve ici à s’appliquer.

Il pourrait ainsi être révélé que telle formation du conseil de prud’hommes de telle ville a accordé des dommages-intérêts dans 63% des cas dans lesquels elle a été saisie d’une demande reposant sur un licenciement discriminatoire. Des décisions analysées, on pourrait également déduire que la moyenne des dommages-intérêts accordés par les formations où siégeait le juge X était de 12.552 euros, ou que ces dommages-intérêts n’ont jamais dépassé 20.000 euros.

Des précisions devront être apportées, si l’on veut que ces données aient un sens et une utilité. Il faut par exemple savoir si la moyenne de dommages-intérêts doit tenir compte des cas dans lesquels la demande a été rejetée (et considérer alors que la somme des dommages-intérêts octroyés par la décision concernée est égale à zéro), ou si l’on ne prend en compte, pour établir la moyenne, que les décisions accordant effectivement une indemnisation au salarié.

D’autres utilisations : l’analyse textuelle.

Une autre utilisation de la BDJ passe par d’autres instruments d’analyse, comme les logiciels d’analyse sémantique, d’analyse textuelle. Une expérimentation a ainsi été menée par quatre chercheurs sur des décisions de la Cour européenne des droits de l’Homme, à partir d’une analyse des mots employés par les juges et par les parties. Se fondant sur une base constituée de quelques centaines de décisions, portant sur trois articles de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales, les auteurs de l’étude estiment parvenir à une prédiction exacte dans 79% des cas (N. Aletras, D. Tsarapatsanis, D. Preotiuc-Pietro et V. Lampos, Predicting judicial decisions of the European Court of Human Rights : a Natural Language Processing perspective, 24 oct. 2016, étude accessible sur https://peerj.com/articles/cs-93).

On peut considérer que ce résultat n’est pas satisfaisant, puisque le logiciel se trompe plus d’une fois sur cinq, mais on peut considérer que l’on dispose déjà d’un instrument complémentaire par rapport à l’analyse traditionnelle.

Une idée ancienne ?

L’idée d’une analyse statistique et probabiliste des décisions de justice n’est pas nouvelle (v. E. Barbin et Y. Marec, Les recherches sur la probabilité des jugements de Simon-Denis Poisson, in Histoire et Mesure, 1987, vol. 2, n° 2, p. 39).

L’informatique permet cependant d’aller très loin dans l’exploration et l’analyse des données – c’est à ce titre qu’on peut parler de « Big Data Judiciaire ». Dès 1963, un avocat américain, Reed C. Lawlor, décrivait déjà ce que les ordinateurs pouvaient faire pour les juristes, à une époque où l’informatique n’était bien sûr encore qu’embryonnaire (R. C. Lawlor, What computers can do : analysis and prediction of judicial decisions, American Bar Association Journal 1963, 49, p. 337).

Mais au-delà de la question des possibilités offertes par l’informatique, cet auteur donnait un point de vue qui demeure d’actualité, puisqu’il écrivait « There is no way that the law can avoid the scrutiny of science. If the lawyers and judges do not participate in this work, it will all be done by others ». Si les avocats et les juges ne participent pas au travail d’analyse scientifique – informatique précisément – ce sont d’autres qui le feront.

Un instrument en développement.

Plusieurs facteurs convergent actuellement pour favoriser l’émergence de la justice prédictive, sinon comme instrument immédiatement opérationnel, à tout le moins comme sujet d’étude digne d’intérêt pour les praticiens et les théoriciens du droit.

Un premier facteur est bien sûr celui de l’ouverture des données jurisprudentielles, mouvement dit de l’Open Data, concrétisé en France par la loi Lemaire. La loi pour une république numérique (n° 2016-1321 du 7 oct. 2016) a ajouté au Code de l’organisation judiciaire un art. L. 111-13 qui dispose notamment que « les décisions rendues par les juridictions judiciaires sont mises à la disposition du public à titre gratuit dans le respect de la vie privée des personnes concernées ».

D’autres facteurs sont technologiques : le développement de l’intelligence artificielle (IA), la capacité croissante à analyser des masses de données gigantesques (le Big Data).

Le dernier facteur est à la fois humain et plus général. Il tient au développement des nouveaux acteurs du droit connus sous le nom de start-ups juridiques ou LegalTech.

On l’aura compris, la question est passionnante et mérite un vrai débat.

Bruno DONDERO

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Comment parler de la jurisprudence que l’on n’a pas lue ?

Un avocat de Grenoble a été récemment radié pour avoir rédigé de fausses décisions de justice, décisions qui devaient fonder la demande d’indemnisation faite par le client de cet avocat à son assureur.

Si cette affaire n’est pas banale (et heureusement), le subterfuge employé par l’avocat était relativement simple. L’avocat avait imaginé ce moyen rudimentaire pour améliorer la situation de son client, et qui exerce le métier d’avocat lit suffisamment de décisions de justice pour pouvoir confectionner des décisions qui ont l’air authentique.

On pourrait parler d’escroquerie au jugement.

Mais pour une décision de justice faite de toutes pièces par un avocat et qui est repérée comme telle, se pourrait-il qu’il en existe en réalité de nombreuses autres qui ne sont pas identifiées comme étant de fausses pièces ?

Il faut cependant distinguer les différentes utilisations que l’on peut faire des décisions de justice et des solutions qu’elles expriment, c’est-à-dire de la jurisprudence.

A quoi sert la jurisprudence ?

Dans l’affaire de l’avocat grenoblois, la décision de justice inventée occupait une place centrale, puisqu’elle fondait semble-t-il à elle seule le droit du client de l’avocat à obtenir une somme d’argent de son assureur.

Mais les avocats se servent aussi des décisions de justice de manière moins « immédiate ». On sait que même si la jurisprudence n’est pas officiellement reconnue comme une source de droit, elle joue ce rôle en pratique. Lorsqu’un avocat rédige une assignation ou des conclusions, destinées à convaincre un juge, il cite fréquemment de la jurisprudence, c’est-à-dire des décisions de justice, émanant de la Cour de cassation ou des autres juridictions. En citant des décisions qui affirment une solution donnée, l’avocat espère convaincre les juges qui le lisent de statuer dans le même sens.

Ne se pourrait-il alors que des avocats citent des décisions de justice qui emporteront la conviction des juges… mais que ces décisions aient été créées pour les besoins de la cause ?

Imaginons l’avocat d’un client A qui veut obtenir la condamnation de la partie adverse B dans une situation donnée, mais qui a conscience que son client A ne devrait normalement pas arriver à ses fins. Ce pourrait être une action en garantie exercée par l’acheteur A contre le vendeur B, mais alors que l’une des conditions légales de l’action n’est pas remplie. La situation du client A serait grandement améliorée si son avocat pouvait produire une décision de justice affirmant que la garantie peut jouer même lorsque manque l’une des conditions légales. Si l’affaire a des enjeux très importants, n’est-il pas tentant de demander à un stagiaire zélé de trouver la décision rêvée, quelle que soit la manière dont il parvient à mettre la main sur ce graal judiciaire ?

Il n’est d’ailleurs pas nécessaire de rédiger une fausse décision en entier. Il est possible de simplement y faire référence dans ses écritures en mettant des sources inexactes (une référence au Dalloz 1948, jur., p. 366 et une note d’un professeur de l’époque, pour faire plus vrai), un lien vers le site Légifrance qui ne fonctionnera pas, ou qui renverra vers une autre décision. Si l’avocat de la partie adverse est vigilant, il demandera à son contradicteur où il a trouvé la décision en question. Mais il sera toujours temps pour le faussaire de plaider l’erreur de bonne foi, au moins lorsqu’il aura simplement cité une décision de manière erronée, ou bien d’accuser son stagiaire !

Une pratique largement répandue ?

Il y a quelques années, Pierre Bayard écrivait un ouvrage intitulé « Comment parler des livres que l’on n’a pas lus ? », et qui reposait entre autre sur l’idée que chaque lecteur se fait sa propre idée du livre qu’il lit, et que l’on peut finalement parler assez librement de tout livre, y compris de celui que l’on n’a pas lu, dès lors que notre interlocuteur, quand bien même il aurait véritablement lu le livre en question, en aura une idée personnelle, nécessairement différente de la nôtre.

On pourrait dire de même que l’on peut parler de la jurisprudence que l’on n’a pas lue !

Ou plus exactement, de la jurisprudence que l’on n’a pas envie de bien lire.

Les arrêts de la Cour de cassation sont comme on le sait sujets à interprétation, parce que la manière dont ils sont rédigés est souvent peu explicite et laisse par conséquent la place à des lectures divergentes. Récemment, la Cour de cassation a certes manifesté un changement dans sa manière de rédiger ses arrêts, mais seule une fraction très réduite de ses décisions est concernée.

Dès lors que l’on peut interpréter la plupart des décisions de justice, il est possible que chacun en ait sa propre lecture, et que tel plaideur fasse dire à une décision de justice des choses très différentes de tel autre plaideur.

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« Cet arrêt dit que j’ai raison et que vous avez tort ! » – « Oui, c’est bien cela, il dit que J’AI raison et que VOUS avez tort !! »

Finalement, au-delà du fait rarissime du « faux jurisprudentiel », c’est-à-dire de la décision créée de toutes pièces, il est une pratique beaucoup plus fréquente d’embellissement de la jurisprudence ou simplement de citation approximative : un plaideur peut affirmer une solution en droit et citer pour la fonder une ou plusieurs décisions de justice. Affirment-elles précisément cette solution ? Ou bien faut-il simplement voir une analogie entre la solution et les décisions citées, qui ne sont alors que  « dans le même sens » ?

Le côté positif des choses

On peut se dire que l’on n’est peu protégé si la justice, en plus d’être surchargée, est au surplus induite en erreur par la production de références jurisprudentielles fictives.

Mais si l’on veut voir les choses de manière plus positive, il faut se dire que tant l’histoire de l’avocat grenoblois que la pratique d’embellissement de la jurisprudence doivent inciter avocats et juristes d’entreprise à rester vigilants lorsque de la jurisprudence est invoquée contre eux.

Lorsque notre adversaire cite un arrêt de la Cour de cassation pour fonder la thèse qu’il veut voir triompher, il est toujours bon d’aller vérifier que cet arrêt – s’il existe vraiment ! – dit bien ce que notre adversaire prétend lui faire dire.

Bruno DONDERO

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Rebondir sans l’examen d’avocat: une initiative utile (25 novembre)

Réussir l’examen d’avocat est l’objectif d’une grande partie des étudiants en droit, qui doivent pour cela parvenir au Master 1, et s’entraîner aux épreuves spécifiques à cet examen particulier.

Particulier, cet examen (ce n’est pas un concours) l’est en effet à plusieurs titres. Il maintient une phase d’admissibilité et une phase d’admission, il comporte une note de synthèse et un « grand oral », et il couvre de nombreux champs du droit. Une de ses particularités est aussi le fait qu’on ne peut pas s’y présenter plus de trois fois.

Pas de session de rattrapage, et on le passe une fois par an. Autant dire que celui qui n’a pas été admis va trouver le temps long pendant les dix mois ou à peu près qui vont s’écouler avant qu’il ne repasse l’examen… s’il décide de le faire.

Les statistiques IEJ par IEJ nous montrent que ce sont des effectifs importants d’étudiants qui sont laissés sur la touche chaque année, des étudiants qui sont à Bac + 4 ou Bac + 5.

Ces étudiants sont dans une situation particulière. Ils sont à la fois très qualifiés et en plein essor, et pourtant ils subissent un coup d’arrêt en n’ayant pas réussi l’examen du CRFPA. Cela sera en réalité peu sensible s’ils commencent à ce moment leur année de master 2, car l’investissement requis par leur année d’études les obligera à oublier leur échec pour un temps. Mais la situation est plus compliquée pour ceux qui ont déjà un master 2 et qui avaient prévu de s’investir dans l’apprentissage du métier d’avocat avant d’exercer cette profession. C’est ainsi tout le programme qu’ils avaient tracé qui est remis en cause.

Il faut donc à la fois digérer cet échec et prendre plusieurs décisions quant à la suite de sa carrière. La première décision est la plus importante: l’étudiant va-t-il repasser ou pas l’examen du CRFPA? S’il décide que non, il fait une croix sur le métier d’avocat… pour quelques années au moins, puisqu’il pourra y revenir quelques années plus tard, par l’une des passerelles qui existent, par exemple avec le métier de juriste d’entreprise.

S’il décide de repasser l’examen, notre étudiant doit occuper les dix mois qui le séparent de la prochaine session. Il doit donc se demander s’il veut se lancer dans un nouveau diplôme, rechercher un stage en entreprise ou en cabinet, ou bien effectuer une expérience à l’étranger, ou pourquoi pas tout cela à la fois! L’étudiant pourrait notamment profiter de ce break pour devenir un spécialiste de la réforme du droit des contrats qui sera adoptée par voie d’ordonnance dans les prochains mois!

Il était en tous les cas dommage que des milliers d’étudiants en droit se retrouvent dans cette situation difficile en même temps en devant la gérer seuls.

C’est donc une excellente initiative que celle mise en œuvre par Maître Stéphane Baller et le cabinet d’avocats Ernst & Young et qui consiste à réunir les étudiants se trouvant dans cette situation pour les mettre en contact avec des entreprises proposant des stages de six mois, et organiser, le 25 novembre prochain à 8h15 à la Défense, une matinée de réflexion collective avec des professionnels et des professeurs, et s’intéresser ensemble à l’avenir professionnel de ces étudiants.

Il faut que ces initiatives se multiplient, et pas seulement en région parisienne.

Bruno Dondero

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Humour et droit: les blagues sur les avocats

L’humour est souvent le révélateur d’une pensée plus sérieuse.

Si vous cherchez des blagues sur les avocats, vous allez en trouver des centaines sur internet, généralement en anglais.

Par exemple sur ce site.

Pourquoi ces blagues sont-elles en anglais ? Parce que les « Lawyers jokes » sont un genre particulier d’humour aux Etats-Unis. Ces blagues se subdivisent en deux courants, qui reposent chacun sur un postulat distinct.

Le courant n° 1 repose sur l’idée selon laquelle un avocat est quelqu’un qui aime l’argent et qui se fait payer très cher pour des prestations peu consistantes.

Cela donne des blagues comme:

Un homme demande à un avocat: « Quel est le montant de vos honoraires ? ».

L’avocat lui répond qu’il est de 10.000 dollars pour trois questions.

L’homme lui demande alors: « N’est-ce pas un peu excessif ? » et l’avocat lui répond:

« Non. Quelle est votre troisième question ? ».

Le courant n° 2 repose quant à lui sur l’idée plus générale qu’un avocat est tout simplement quelqu’un de détestable.

Un exemple de blague relevant du courant n° 2 est la suivante (elle est citée dans les films « La guerre des Roses » et « Philadelphia ») :

What do you call 500 lawyers lying on the bottom of the ocean?

A good start…

VF : qu’est-ce que cinq cent avocats au fond de l’océan ?

Réponse : un bon début…

Comme on le voit, il n’y a pas vraiment besoin de connaissances juridiques pour comprendre les blagues anti-avocats.

Pour autant, elles n’ont pas autant de succès en France qu’aux Etats-Unis.

Cela se comprend aisément pour les blagues du courant n° 1. Difficile de faire rire en France avec l’idée que l’avocat est âpre au gain, alors que l’avocat français est soumis à des règles assez contraignantes quant à ses honoraires, et que le désintéressement est une règle essentielle de la profession d’avocat…

Mais cela n’explique pas l’insuccès en France des blagues du courant n° 2.

La seule explication ? C’est que nous aimons nos avocats !

Bruno DONDERO

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Un nouveau métier : urgentiste du droit (juriste régulateur)

Les nouvelles pratiques font disparaître certaines manières de pratiquer le droit, voire des pans entiers de certaines professions, mais dans le même temps, ce sont des activités nouvelles et même de nouvelles professions qui apparaissent. Ces nouvelles pratiques tiennent à plusieurs facteurs. L’innovation technologique en est une, qui permet à un particulier ou à une entreprise de trouver son avocat par internet en quelques secondes, et qui permet dans le même temps à un avocat de proposer ses services très simplement. La crise économique et la volonté des entreprises de réduire toujours plus leurs coûts est un autre facteur, qui conduit à la disparition de certains modes d’exercice de la profession d’avocat ou à la réduction des services juridiques internes. La complexité croissante du droit est un dernier facteur de mutation des professions juridiques.

Il est une profession que l’on pourrait voir apparaître, ou plutôt une activité qui pourrait se développer au sein du métier d’avocat ou de juriste d’entreprise, et qui est celle de « juriste urgentiste » ou de régulateur du droit.

Imaginons qu’un cabinet d’avocats soit saisi d’une opération par l’un de ses clients, par exemple qu’une société demande à ses avocats de réaliser pour elle une opération d’acquisition d’une entreprise de son secteur. Si le cabinet d’avocats est d’une certaine importance, il comptera plusieurs départements, plus ou moins formalisés. Par exemple, un département rassemblera un ou plusieurs avocats spécialisés en droit fiscal, un autre les avocats intervenant en droit de la concurrence, un troisième les avocats intervenant en droit social, un autre encore les avocats spécialisés en fusions et acquisitions. A priori, c’est ce dernier département qui aura été saisi du dossier, et c’est très bien, puisque le dossier est ainsi qu’on l’a dit une opération d’acquisition d’entreprise.

Une acquisition d’entreprise pose avant tout des problématiques de droit des sociétés et de droit des contrats, qui constituent effectivement le cœur de compétence des avocats spécialisés en fusions et acquisitions : organisation des négociations relatives à l’opération, choix des actes préparatoires à rédiger (de la lettre d’intention aux promesses, en passant par des accords de confidentialité), transmission des parts ou des actions représentant le capital de la société cible, choix de la protection à accorder à l’acquéreur contre les aléas de l’opération (garantie de passif) et des risques antérieurs à l’opération à lui transférer (reprise des garanties et responsabilités), etc.

Mais l’acquisition d’une entreprise soulève de très nombreuses autres questions, liées à d’autres branches du droit. C’est ainsi la fiscalité de l’opération elle-même qui mérite d’être étudiée et au-delà, l’impact de l’acquisition sur la situation fiscale de chacune des parties. Le droit de la concurrence aura également son mot à dire : est-il acceptable pour le secteur économique concerné que celui-ci connaisse une telle concentration ? Le droit social est également important, puisqu’il déterminera le transfert ou le maintien des contrats de travail des salariés de l’entreprise acquise ainsi que des dettes nées antérieurement à leur égard. Le droit de l’environnement, le droit de la propriété intellectuelle, peuvent être aussi sollicités.

Ce que l’on pourrait ne voir que comme une simple opération d’acquisition revêt donc en réalité de multiples facettes, ce qui soulève deux questions.

La première question est relative au rôle de l’avocat. Lui appartient-il d’identifier ces différents aspects de l’opération pour les signaler à son client ? Il est tentant de penser que oui, car l’avocat est celui qui sait ou qui a les moyens de savoir. Mais qui saisit un avocat pour qu’il organise une opération d’acquisition souhaite-t-il lui confier ce travail particulier d’identification de toutes les questions juridiques potentiellement soulevées par le dossier ? Si c’est le cas, il faut envisager une rémunération de l’avocat qui prenne aussi en compte cet aspect des choses.

La seconde question tient à la manière dont l’avocat peut identifier ces différents risques. Si son client lui demande de réaliser une opération de cession, l’avocat va logiquement se concentrer sur cet aspect des choses, d’autant que le client se sera peut-être tourné précisément vers l’avocat parce qu’il le sait spécialisé dans un domaine particulier. La complexité toujours croissante du droit induit d’ailleurs cette spécialisation.

C’est à ce stade qu’il serait souhaitable qu’intervienne le juriste régulateur. C’est peut-être la compétence bien particulière d’un avocat dans un domaine précis qui lui a permis d’être choisi pour traiter une opération, mais cela n’exclut pas un examen du dossier sous tous les angles juridiques. Un patient peut choisir de se tourner vers un hôpital ou une clinique parce qu’un chirurgien réputé y exerce, mais cela n’exclut pas qu’il fasse l’objet d’un examen généralisé à son arrivée, pour dresser sa situation médicale complète. De même, qui entre aux urgences fait l’objet d’un premier examen qui déterminera vers quels services spécialisés orienter le patient. C’est une prestation du même type que fournirait le juriste urgentiste ou régulateur du droit.

On connaît déjà le profil particulier de l’avocat qui cherche et trouve les clients et les dossiers, même s’il ne traite pas ensuite lui-même directement ces dossiers, celui que l’on appelle l’avocat rainmaker. C’est un profil un peu différent que celui de juriste régulateur, car il est avant tout un technicien, et il interviendra à un stade intermédiaire, pour identifier les différents besoins juridiques d’un dossier et les compétences à mettre en œuvre au sein du cabinet. Ce n’est pas ce juriste qui trouvera les clients et les dossiers, mais il contribuera à faire apparaître, au sein d’un dossier existant, d’autres dossiers pour le même client, nés de la nécessité de traiter tel ou tel aspect de la situation juridique de ce client, aspects qui n’avaient pas été envisagés initialement (le rainmaker pourrait d’ailleurs être le régulateur de son cabinet d’avocats).

Cela entraînera-t-il un accroissement des coûts pour les clients concernés ? Non, car il n’est pas dit que l’identification appelle un traitement particulier du dossier, mais il sera toujours utile d’avoir repéré le plus tôt possible qu’un dossier venu aux mains des avocats sous telle étiquette comportait également d’autres aspects. Les avocats et leurs clients pourront alors décider en connaissance de cause du traitement à donner à ces aspects nouvellement identifiés.

Bruno DONDERO

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