Chers étudiants du cours de droit des sociétés et participants au FacebookLive,
Nous abordons demain l’étude du dirigeant de société.
Nous utiliserons un cas pratique qui s’impose plus que tout autre, puisque nous parlerons de la situation de Carlos Ghosn.
Nous aborderons plusieurs points lors du cours de demain, et je vous invite pour une meilleure compréhension à consulter les statuts de la société Renault SA, disponibles ici.
Nous allons déjà nous intéresser à la « double casquette » de M. Ghosn au sein de la société Renault (il a d’autres mandats sociaux dans d’autres sociétés, Nissan notamment)
M. Ghosn est « PDG » de la société Renault. Cela veut dire qu’il est « président-directeur général », ce qui correspond en réalité à deux fonctions en même temps et même à trois si l’on tient compte du fait que notre homme est également administrateur.
I – Le mandat de président du conseil (« P » de « PDG »).
M. Ghosn est tout d’abord président du conseil d’administration (le « P » de « PDG »). Cela veut dire qu’il préside un organe de la société: le conseil d’administration.
Voici les articles 15 et 16 des statuts de la société Renault, relatifs aux pouvoirs du conseil d’administration et à son président.
Comme on le voit, le conseil d’administration (l’art. 15 des statuts de Renault reprend l’art. L. 225-35 du Code de commerce) détermine les orientations de l’activité de la société et veille à leur mise en œuvre.
Le président de cet organe n’a quant à lui pas de pouvoir de direction propre… en principe. L’art. L. 225-51 du Code de commerce lui donne comme mandat d’organiser et diriger les travaux du conseil d’administration, ce que l’on retrouve à l’art. 16 des statuts de Renault. Simplement, ceux-ci ajoutent que le président du conseil « exécute ses décisions », ce qui dépasse les pouvoirs légaux.
Un « simple » président du conseil n’a pas les moyens de par ce seul mandat social d’exécuter les décisions du conseil, mais c’est autre chose lorsque ce premier mandat se double d’un mandat de dirigeant exécutif (ce terme n’est pas dans le Code de commerce).
Si le président du conseil a reçu aussi le mandat de directeur général, il est « PDG », ce qui lui donne un double rôle.
II – Le mandat de directeur général (« DG » de « PDG »).
Le directeur général est le dirigeant exécutif de la société.
Pour la société Renault, il est indiqué par les statuts dans l’art. 17 quels sont les pouvoirs du DG:
Le directeur général est investi des pouvoirs les plus étendus pour agir en toute circonstance au nom de la société. Il exerce ces pouvoirs dans la limite de l’objet social et sous réserve de ceux que la loi attribue expressément aux assemblées d’actionnaires et au conseil d’administration.
Le directeur général représente la société dans ses rapports avec les tiers.
La société est engagée même par les actes du directeur général qui ne relèvent pas de l’objet social, à moins qu’elle ne prouve que le tiers savait que l’acte dépassait cet objet ou qu’il ne pouvait l’ignorer compte tenu des circonstances, étant exclu que la seule publication des statuts suffise à constituer cette preuve.
La société Renault a décidé, par la voix de son conseil d’administration, de réunir les mandats de président du conseil et de directeur général pour qu’ils soient exercés par une seule et même personne.
L’art. L. 225-51-1 du Code de commerce dispose:
La direction générale de la société est assumée, sous sa responsabilité, soit par le président du conseil d’administration, soit par une autre personne physique nommée par le conseil d’administration et portant le titre de directeur général.
Dans les conditions définies par les statuts, le conseil d’administration choisit entre les deux modalités d’exercice de la direction générale visées au premier alinéa. Les actionnaires et les tiers sont informés de ce choix dans des conditions définies par décret en Conseil d’Etat.
Lorsque la direction générale de la société est assumée par le président du conseil d’administration, les dispositions de la présente sous-section relatives au directeur général lui sont applicables.
C’est donc le choix d’un PDG et non de deux personnes distinctes qui a été fait par le conseil d’administration de Renault.
Ce choix est rappelé dans le document de référence de la société, dont voici un extrait:
Les justifications apportées au choix de gouvernance ainsi fait sont intéressantes, notamment lorsqu’il est dit que la présidence + direction générale, ce que l’on appelle la présidence non dissociée est « très majoritaire » dans les sociétés cotées.
Il est indiqué dans le dernier rapport du Haut Comité pour le Gouvernement d’entreprise:
« Dans les sociétés à conseil d’administration la question de la dissociation des fonctions de président et de directeur général demeure un sujet récurrent et important notamment au regard des attentes des investisseurs anglo-saxons, il est constaté une légère croissance du mode de direction unifié pour le CAC 40 (61,8 % contre 58,8 % en 2016) et une stabilité au niveau du SBF 120 ( 51% pour 2016 et 2017), alors qu’un changement de mode de direction est intervenu en 2017 dans 4,8 % des sociétés du SBF 120 et 2,9 % au sein du CAC 40.«
La suite demain en amphi et en vidéo !
Bruno DONDERO